Archives mensuelles : juillet 2014

31 juillet 1914

Les faisceaux [1] sont formés dans la cour du quartier depuis ce matin. On attend enthousiastes. C’est l’heure de la revanche.
Le soir tombe. On se couche équipés. On partira sans doute cette nuit. Les officiers peuvent réintégrer leurs foyers, prêts à être alertés. L’un d’entre eux couche au quartier, le sous-lieutenant Péquin marié depuis un mois à peine, il a dit adieu à sa jeune femme et ne saurait supporter une seconde entrevue. Le devoir prime tout.

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[1] Faisceaux : Lors des bivouacs et des haltes suffisamment longues, l’ordre est donné de mettre les fusils en faisceaux, c’est-à-dire les reposer verticalement par groupe de trois, en triangle, adossés ensemble par leurs canons. Les hommes alignent sur le sol leur barda et leurs armes, de manière uniforme. Ils peuvent alors quitter ces  « faisceaux » d’armes qui restent seulement à la garde et surveillance d’une sentinelle.

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Source : http://europeana1914-1918.eu/fr/contributions/9764

25 juillet – Première partie

Préambule sous forme d’avertissement…
Aujourd’hui 25 juillet 2014, commence cent ans après, jour pour jour, le journal de campagne rédigé par Émile Lobbedey. Ce journal, retranscrit à partir des huit cahiers qu’il nous a laissés, respecte autant que possible le texte original. En conséquence, le lecteur y rencontrera parfois des incorrections, parfois des maladresses dans l’expression. J’ai jugé bon de ne pas les corriger car elles sont le reflet de la propre langue d’Émile Lobbedey et de celle de son époque…
Tous mes remerciements à Michel Meyer pour ses multiples relectures et corrections orthographiques.

 

Chapitre I     La Frontière

              Les bruits de guerre circulent dans la ville. La situation est grave : ultimatum [1] de l’Autriche  à la Serbie ; Allemagne menaçante. La France qui fut toujours le défenseur de la justice et du droit ne peut assister impassible à un semblable crime : l’écrasement du plus faible par le plus fort. La France n’oublie pas : l’Allemagne a une dette à lui payer : 70.
Les hostilités ? Non. La mobilisation [2] ? Non plus. Mais nous sommes troupes d’élites, régiment de couverture. Il faut s’attendre à partir d’un moment à l’autre et à prendre position à la frontière.
Tous les permissionnaires sont rappelés et doivent répondre aussitôt le rappel reçu.


[1] Ultimatum : Note par laquelle un État somme un autre État de donner satisfaction à un certain nombre d’exigences dans un délai limité, et de façon péremptoire, faute de quoi l’état de guerre naît automatiquement à l’expiration du délai. (L’ultimatum précède la déclaration de guerre)


[2] Mobilisation : Mise sur pied de guerre des forces militaires d’un pays par le rappel dans les armées de tous ceux qui sont désignés pour y servir en temps de paix.

Préface

preface

 

 A Monseigneur Lobbedey,
Évêque d’Arras, Boulogne, Saint Omer.

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Mon Oncle,

                            Je vous dédie mon modeste journal de campagne. Je ne puis mieux faire : vous êtes la tête et le cœur de notre famille, vous en êtes l’honneur et la joie. En retour votre neveu sera toujours digne du nom qu’il porte.

                                   Ainsi nos traditions familiales se continuent ; n’avons-nous pas eu nos héros sous Napoléon et nos prêtres de tout temps ? Et notre maisonnée réalise toujours cette belle devise “Dieu et Patrie” : vous êtes le prêtre, je serai le soldat, Télémaque fidèle du glorieux Mentor que vous êtes pour moi.

Émile Lobbedey

 

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Monseigneur Lobbedey.

Évêque d’Arras, Boulogne, Saint Omer, il est l’auteur d’un ouvrage intitulé :La guerre en Artois : paroles épiscopales : documents, récit (1916) “.
Ouvrage consultable sur le site de l’université d’Ottawa à cette adresse : https://archive.org/details/laguerreenartois00lobb