Dampierre
(voir topo tome VIII)
Extrait de la carte d’état-major – Source : Géoportail
Nous nous levons assez tard et nous rendons à la popote*. Après cela, le café bu au travail. Nous sommes heureux de notre installation. Dans la matinée nous recevons la visite du sergent fourrier de la 8e Jombart rentré hier soir de Sainte-Menehould. Il nous fait rire en nous expliquant le nez qu’il a fait en rentrant à Braux-Saint-Rémy où il n’y avait plus personne. Ce n’est pas sans mal qu’il est arrivé à Dampierre vers 11 heures du soir après s’être renseigné aux quatre coins du chemin sur l’endroit vers lequel nous nous étions dirigés.
Nous réglons avec lui les comptes de la compagnie et prenons livraison de tout ce qu’il a acheté.
Je reçois quantité de boîtes de pâté à distribuer aux hommes avant le départ. Je vais trouver le capitaine dans sa chambre et décide de faire les distributions aussitôt. Les hommes sont heureux d’avoir une amélioration dans leur musette.
Culine et Gibert viennent se plaindre que les hommes de leur section ont très peu de paille. Il faut que je me charge de leur en procurer : travail de cet après-midi.
Après mes distributions, je vois le capitaine Sénéchal, commandant le bataillon qui cause avec le capitaine Aubrun. Nous parlons question paille. Il ne faut pas compter sur l’intendance. Je décide donc de faire le nécessaire.
Mascart est au bureau quand je rentre. Il s’acquitte bien de ses fonctions et est heureux de son poste d’agent de liaison près du colonel. Celui-ci fait notes sur notes sur la propreté du cantonnement et le nettoyage des routes ; sur la tenue ; sur la consigne des cafés ; sur les sorties du cantonnement après la soupe de 17 heures : c’est la présence du général de corps d’armée qui nous vaut cette avalanche.
Lannoy lit tout cela au rapport de 10 heures. Le colonel préconise même un certain exercice. Vraiment c’est à croire que notre chef ne vit plus que de frousse.
À 11 heures nous mangeons en popote. On se distrait à parler encore et toujours de Sedan et nos hôtes nous racontent leur fugue lamentable de Pouru-Saint-Rémy qui doit être complètement brûlé. Ils ont trouvé ici une maison abandonnée et avec l’autorisation du maire s’y sont installés, vivant surtout du passage des troupes.
Mon après-midi se passe à chercher de la paille. Je me rends directement chez le maire qui m’indique deux fermes où je pourrais en trouver en donnant un bon de réquisition. Vers 3 heures, une bonne portion de bottes arrivait à la compagnie amenée par la voiture de compagnie. On fit les distributions et je pris quelques bottes pour le bureau. Licour se charge de nous faire une literie dans un coin de la pièce et promet à la châtelaine de tout enlever au départ. Le brave garçon d’ailleurs lave le couloir d’entrée à la grande satisfaction de notre propriétaire.
Vers 4 heures nous recevons la visite d’un capitaine d’état-major qui nous demande un homme dévoué, intelligent et dégourdi pour couper un peu de bois dans la demeure du général. Nous lui donnons Jacquinot qui n’a plus de magasin. Nous envoyons Licour acheter une boîte de homard, du vinaigre, etc.… Nous collationnons. C’est Lannoy qui a émis cette idée et cette idée est excellente.
Enfin le soir arrive et avec lui rentre au cantonnement une bonne partie de la compagnie qui a passé l’après-midi à aménager, rapproprier les alentours du cantonnement et nettoyer la route qui est boueuse. Depuis ce matin le temps s’est remis un peu au beau. Un léger soleil a brillé.
Le capitaine vient nous voir vers 5h30. Il met exercice demain matin et demain après-midi de 7 heures à 10 heures et de 2 à 5 sur la route de Sainte-Menehould.
Nous filons alors à notre popote annonçant la nouvelle à nos amis. Nous sommes satisfaits malgré tout : l’annonce de l’exercice signifie que nous ne partons pas demain.
La soirée se passe agréablement et à 9 heures nous étions couchés dans la paille côte à côte, Lannoy, Jamesse, Licour, Rogery et moi.