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8 février

À 6 heures, nous entendons le clairon. Debout ! Les cuisiniers ont déjà le chocolat prêt et Licour astique les affaires de l’un et de l’autre.

À 7 heures, selon l’habitude, chacun part à l’exercice. Nous recevons la visite de Brillant : il me faut ce matin à 9 heures aller chercher des fournitures à l’officier de détail. Voilà ma matinée occupée. J’avertis Jacquinot pour qu’il se tienne prêt et me rends chez Verley et Toulouse que je trouve encore couchés. Je leur dis que « C’est une honte » et les invite pour ce soir au nom de la popote*. Ils acceptent de grand cœur et seront prêts à 5 heures pour l’apéritif.

À 9 heures, je suis chez l’officier de détail et touche quantité de képis et quelques paires de souliers. J’entasse tout cela dans le magasin. J’assiste au retour de l’exercice de la compagnie. Réellement, elle a belle allure et on ne croirait pas que là-dedans la majorité sont des réservistes.

Le capitaine vient au bureau. Il nous montre, en criant, à Lannoy et à moi un papier du colonel Rémond, actuellement général de brigade, notre ex-colonel. Celui-ci le félicite et lui annonce qu’il est nommé chevalier de la Légion d’honneur. Notre cher capitaine est aux anges. Nul doute qu’aujourd’hui, la nouvelle paraîtra à l’ordre du régiment.

Du coup, Lannoy demande au capitaine un cochon pour la compagnie. On compulse le cahier d’ordinaire sur lequel le capitaine a toujours l’œil fixé car il tient à son boni [1] comme à la prunelle de ses yeux. Puis d’un noble geste, il offre le cochon. On le remercie vivement. Delbarre et Massy sont aussitôt avisés de la bonne nouvelle : ils vont chercher l’animal.

10 heures, je vais lire le rapport qui ne contient rien d’intéressant quand Lannoy arrive avec la décision du jour signée du colonel. Les capitaines Claire et Aubrun sont nommés chevaliers de la Légion d’honneur, avec une citation presque identique qui a trait aux séjours dans la Gruerie du 16 au 19 septembre derniers et à l’attaque ennemie qui fut brillamment repoussée par la compagnie. Et dire que ces jours-là, Claire et Aubrun s’en voulaient à mort ! Je lis la chose à la compagnie dans la grange de la section Alinat et déclare aux poilus que le capitaine leur offre un cochon. C’est un enthousiasme général.

Après quoi, je rentre à la popote et nous nous mettons à table. J’annonce que ce soir, Verley et Toulouse sont des nôtres. Aussitôt, les cuisiniers sont chargés d’acheter ce qu’il faut et de nous faire quelque chose de convenable. Tous, nous espérons que le capitaine nous paiera le champagne, grâce à sa décoration. Au sujet de la citation, les avis sont un peu partagés. Mais on n’insiste pas. Culine cependant déclare qu’il aurait bien fait de faire citer quelques-uns d’entre nous qui lui ont fait gagner sa croix.

Au milieu du repas, Delbarre vient annoncer au sergent-major que le cochon est trouvé. Il indique le prix. Lannoy l’envoie à Charmontois-le-Roi s’entendre avec le capitaine.

À 1 heure, chacun part à l’exercice de nouveau tandis que je me plonge dans les paperasses.

Dans l’après-midi, je reçois des lettres de chez moi, ainsi qu’une lettre de Monsieur Roger de Marville, mon ancien hôte d’antan. Je lui avais écrit, ayant eu son adresse de son cousin, le sergent Prestat [2], vaguemestre*. Le brave homme est à Châlons-sur-Marne. Son jeune fils est engagé comme artilleur à Rennes. Il a quitté Marville à l’arrivée des Allemands avec son fils, laissant femme, filles et biens. Heureux est-il de m’annoncer qu’il a des nouvelles du pays : sa femme lui a écrit que Marville était respecté, le Kronprinz et l’empereur son père par la suite y ayant été bien accueillis et ayant promis de sauvegarder les habitants. La famille Roger loge des officiers qui se conduisent très bien. Tout ceci m’intéresse au plus haut point, car je songe souvent à Marville au temps où nous grillions de nous cogner avec les boches.

Enfin le soir tombe et Lannoy et moi, bouclons nos cahiers. C’est l’heure de la détente. Nos amis, revenus de l’exercice de l’après-midi, sont déjà chez La Plotte. Nous prenons Verley et Toulouse au passage et filons vivement là-bas amenant avec nous Jamesse que Rogery remplace. En route, nous rencontrons le colonel qui nous arrête, examine galons et dit à Jamesse qu’il devra les placer mieux que cela car ils vont s’effilocher. On salue.

Après une bonne heure passée ensemble au coin du feu avec les gendarmes, nous rentrons dîner, par un temps froid mais toujours sec.

La soirée se passe cordialement autour de notre table familiale. On jase, on parle, on rit beaucoup. Enfin on se quitte vers 11 heures après avoir épuisé notre répertoire de chansonnettes. Je me couche et hérite encore de Maxime et de Jamesse. Je ne puis les loger tous deux. Jamesse décide donc, en tant que plus jeune, d’aller coucher dans la paille avec ses couvertures. Maxime d’ailleurs n’a pas attendu cette décision pour dormir profondément.

Lannoy de son côté déclare dormir beaucoup mieux dans le foin que dans un lit. J’en suis content car je suis propriétaire du plumard de cette façon. Enfin, à 11 heures 30, toutes lumières éteintes, le calme [le] plus profond régnait, mais la table non desservie en disait long sur les libations de la soirée.

 

 


 

[1] boni : Somme qui excède la dépense faite ou l’emploi de fonds projeté.

[2] Prestat : Plus d’informations sur le Blog du 147e RI : http://147ri.canalblog.com/archives/2015/12/23/33093572.html

22 janvier

Debout à 7 heures ! Débarbouillage ! Chocolat !

À 8 heures, nous avons déjà le capitaine Aubrun sur le dos. C’est aujourd’hui revue. La belle affaire !

Revue du colonel à 2 heures. Tout le monde présent… À part le sergent major et son fourrier* naturellement.

Le capitaine lui aussi est atteint de frousse. Enfin on écrit tout ce qu’il dit ; propreté extrême, couchage, râteliers d’armes, prison. La même chose que le lieutenant-colonel Desplats.

Aussi revue à 10 heures. Si ce n’est pas propre, je n’y comprends rien, car une revue a déjà été passée hier.

Les étiquettes sont-elles placées ? Oui. Les consignes sont-elles affichées ? Oui. Il y a sans doute un magasin ? Oui. Un séchoir ? Oui. Un salon de coiffure ? Oui, c’est-à-dire non, car il serait risible de coller l’étiquette « Salon de coiffure » à une écurie dans laquelle un type arrache les cheveux d’un autre type à genoux.

À 10 heures la revue se passe. Oui, tout est propre. On peut attendre… l’ennemi.

À 11 heures nous nous mettons à table, mais c’est encore une visite du capitaine qui vient demander des renseignements et nous demande de ne pas tarder à table. Décidément c’est la grande frousse.

Enfin à 2 heures grrrr…ande revue. Je suis avec le capitaine près du PC du général de division attendant le colonel Blondin. Celui-ci ne tarde pas à poindre à l’horizon suivi du lieutenant-colonel Desplats. Nous partons à leur rencontre et successivement voyons la section Culine, celles du sous-lieutenant Alinat. Tout est propre et le colonel félicite le capitaine Aubrun qui est tout gaillard de ce coup-là et explique alors… Séchoir,… Salon de coiffure, préconise des douches, des lavabos, parle de l’initiative d’un magasin… Nous voici à la section d’Ornant puis à celle de Gibert.

« Très bien, sergent » lui dit le colonel Blondin « Mais il faudra me faire tailler votre barbe ».

« Ceci est un vœu » déclare Gibert le doigt indiquant son poil hirsute « j’ai promis ainsi que mes camarades de garder ma barbe tant que l’ennemi serait sur notre sol. Ceci nous fut demandé par notre chef de section, le lieutenant Pougin de la Maisonneuve de glorieuse mémoire ».

Bouche bée le colonel Blondin s’en va, faisant à son entourage un petit geste qui en dit long sur l’opinion qu’il a du sergent. Le lieutenant-colonel Desplats admiratif s’approche de Gibert au port d’armes et lui dit le regardant dans le blanc des yeux : « votre vœu ? … Vous serez sous-lieutenant »

« Ce à quoi tient un galon », me disait Gibert, après la scène, pris d’un fou rire, « j’en ai imposé au colon ».

04 Première partie de l'album : 99 photos

http://www.europeana1914-1918.eu/en/contributions/10208

La revue est terminée. Le capitaine rassemble les sous-officiers et nous dit toute sa satisfaction. Suit le sempiternel « vous êtes libres ! ». Nous filons aussitôt comme une nuée de moineaux qui s’envolent.

« À tout à l’heure là-bas ! » Crie Culine qui [nous] a suivi en tapinois [1] par ici après la revue de sa section.

Je rentre au bureau. Lannoy aussitôt boucle ses cahiers, et vivement nous filons du côté Culine emmenant avec nous Cattelot et Gibert. Il est 4 heures. Culine est sans doute déjà occupé à trinquer avec Maxime qui apprécie « le blanc » à sa juste valeur.

Un soldat nous indique la maison, grande ferme, où nous entrons. Nous sommes reçus par la fermière qui aussitôt nous introduit dans les cuisines où en effet Culine et Maxime sont assis. Voilà le coin rêvé ! Maison particulière, entrée libre, aucun soldat à part nous.

Une heure après quelques cadavres gisaient sur la table et nous avons bien de la peine à empêcher Maxime de chanter à tue-tête tandis que Gibert riait d’un petit rire bête qui d’esprit [à la réflexion] nous faisait émettre des doutes sur sa lucidité.

Nous ne tardons pas à rentrer, désirant faire une incursion chez Madame La Plotte. Mais le débit est fermé ; tout est éteint. Nous engageons des pourparlers. Ils n’aboutissent pas. Il faut attendre décemment 24 heures avant de déroger aux règlements.

Nous rentrons donc bredouilles dans notre home familial. Bientôt nous sommes à table et mourons de fou rire par les réparties spirituelles de Gibert qui engage un duel avec le brave Maxime qui répète sans cesse « la rrrr’evue, elle était un peu là ! ». Nous nous distrayons, c’est un grand point.

Nous recevons la visite d’ « Aristide* » notre Brillant national. Celui-ci nous apporte les notes du bataillon. Cela commence à devenir l’habitude le soir. Lannoy se rend à la popote des officiers. Le colonel préconise un commencement d’exercice [2] pour demain. Bigre ! Mauvais cirage. Nous allons mener la vie de caserne.

Autre grande nouvelle. Un peloton d’élèves sous-officiers sera constitué pour la 4e division dans Charmontois-le-Roi, en unités séparées à tous points de vue, exercices, vivres, comptabilité, avec sergent major etc.… sous les ordres du capitaine Claire.

Envoyer les noms pour demain des caporaux à envoyer. Installation du peloton demain après-midi.

Un peloton d’élèves caporaux par bataillon sera formé sous les ordres du sous-lieutenant Carrière. Réunion pour l’exercice seulement. Chaque compagnie enverra un sergent qui sera en charge du peloton.

Lannoy ne tarde pas à revenir. Il y a demain petit exercice à rangs serrés de 7 heures à 9 heures et de 2 heures à 4 heures. Travaux de propreté le reste du temps. Lannoy, Jamesse et moi restons naturellement au bureau. Pignol, Boulanger et Jeanjoet vont au peloton des E.S.O. [élèves sous-officiers]. Cattelot est chargé des E. C. [élèves caporaux] de la compagnie. À 9 heures après quelques conversations au coin du feu et un bon conseil à Maxime un peu ému, nous nous couchons heureux de pouvoir dormir tranquilles.

Mon rhume chipé à Fontaine Madame alarme mes hôtesses qui me soignent comme de vraies sœurs. J’en suis tellement touché, que je me promets de demander une carte de remerciements à ma famille.


[1] en tapinois : En cachette ; sournoisement.

[2] exercice : Nom générique donné aux manœuvres, instruction des troupes et exercices exécutés par les soldats en période dite de repos. De nombreux combattants ont noté leur inutilité et leur effet négatif sur le « moral ».

 

18 janvier

Séjour à Florent

Impossible de dormir, tellement je suis énervé ! et mouillé… Je fume cigarette sur cigarette ! Tandis qu’un à un mes amis rentrent plus ou moins boueux, le dernier est Paradis ; il peut être 2 heures du matin. Au-dehors c’est une allée et venue sans pareille de troupes qui chuchotent.

Allons, tout va bien ! Nous pouvons dormir jusque 7 heures, c’est l’heure fixée pour notre départ ! On s’étend et on s’endort pêle-mêle les uns sur les autres, la joie au cœur, et la tête remplie d’un avenir de félicité !

Il est 6h30. Nous sommes réveillés par des appels. C’est le capitaine Claire qui nous envoie son ordonnance [1], Stewart, on va partir.

Bientôt arrivent tout rieurs le capitaine Aubrun et le lieutenant Carrière, Gout et Vals. Le capitaine Claire les suit. Nous pouvons partir de l’avant. Adieu Gruerie ! Nous agitons nos képis en passant le petit pont de bois de Fontaine Madame.

Nous partons, déambulant dans la boue, mais avec une hâte fébrile de quitter ce mauvais coin où nous avons laissé tant des nôtres.

Non loin de la Harazée nous attrapons le colonel Desplats et le capitaine de Lannurien. Ceux-ci sont boueux comme nous et nous amusent par les contorsions qu’ils font pour ne pas s’aplatir dans les flaques d’eau. Nous arrivons dans la Harazée vers 8 heures. Un petit soleil semble saluer notre passage, cela nous fait plaisir. Ce qui nous plaît moins, ce sont quelques shrapnells que les boches nous envoient.

Nous ne nous arrêtons pas en conséquence dans ce coin peu hospitalier. J’ai un souvenir en passant pour Jean Carpentier. Il eût été si heureux, le pauvre, de filer aussi avec nous ayant l’expectative d’un long repos.

Les shrapnells* nous suivent et même des obus percutants* se mettent de la partie. J’émets donc l’avis qu’il serait ridicule de se faire tuer ou blesser ici. Nous laissons donc la cote de la Harazée, malgré Gallois qui veut y passer quand même. Quand Legueil, René, mitrailleur, Paradis, Sauvage, et Crespel le cycliste, nous prenons la route de Vienne le Château. C’est un détour de 10 km. Au moins nous serons à l’abri, et d’ailleurs nous avons pour nous toute la journée et journée de plus ensoleillée.

Nous filons donc rapidement sur Vienne-le-Château, en hâte car la zone quoique moins visée que la cote de la Harazée est fort dangereuse quand même. C’est d’ailleurs ici que dernièrement tombaient les obus lancés contre nos voitures de ravitaillement, spectacle auquel nous assistâmes étant dans la Harazée. Presqu’à l’entrée de Vienne le château, nous sommes dépassés par tous les officiers de notre bataillon. Eux aussi prennent notre route pour plus de sûreté.

Il est 8h30. Le temps est splendide ; sans doute le soleil sabre-t-il notre départ de l’Argonne et veut-il fêter comme nous le fameux repos qui nous met le cœur en liesse.

Nous nous arrêterons dans le château et entrons dans une maison abandonnée où quelques marsouins font popote*. Nous profitons de la pause pour faire du café. Il y a ici tout ce qu’il faut pour cela et les camarades de l’infanterie coloniale sont très complaisants.

Image illustrative de l'article Adolphe Guillaumat

               Général Guillaumat

Nous voyons passer un général de division avec tout son état-major et sa suite. Sans doute est-ce celui qui succède au nôtre, le général Guillaumat, et qui vient voir un peu ce que ses troupes doivent garder.

Le café bu, nous partons, tranquillement cette fois, car les obus sont rares de ces côtés. Nous marchons dans la direction de Vienne-la-Ville. Nous voyons à notre droite à 2 km sur sa hauteur le village de Saint-Thomas en ruine. Au carrefour de la route qui mène à Saint-Thomas, Pêcheur sergent secrétaire du colonel me dépasse à bicyclette en me criant bonjour. Décidément tout le monde suit notre idée et personne n’a aimé affronter la route de la Placardelle toujours balayée d’obus.

On continue. Bientôt nous rencontrons deux compagnies d’un régiment inconnu. Puis un galop de cheval nous fait tourner la tête. Aussitôt nous rectifions la position, c’est le colonel Desplats suivi du capitaine de Lannurien. Lui aussi prend notre route. En passant le colon nous crie aimablement « à Florent ! ».

Voici Vienne-la-Ville. Nous faisons une nouvelle pause. Réellement la route est longue. Nous avons abattu une dizaine de kilomètres et nous en avons encore 15 au moins.

Enfin nous repartons quand soudain quelle aubaine ! Des caissons d’artillerie nous dépassent à vide rentrant au cantonnement à Moiremont.

Une, deux ! Nous sommes dessus, blaguant avec les artilleurs, et chantant à tue-tête. Naturellement il n’y a pas de ressorts, on est un peu secoué, mais on est si heureux et il fait un si bon soleil. Nous arrivons ainsi à Moiremont. Il nous faut descendre, car les caissons s’arrêtent ici. N’empêche que cela nous fait 8 km de parcourus gaiement. Je me souviens de la boulangerie d’autrefois quand nous avons logé dans la ferme Hulion qui brûla la nuit. Si je pouvais avoir un pain frais. J’arrive, j’insiste et puis achète. Quelle bonne chère nous allons faire tout à l’heure sur le bord de la route en cassant la croûte.

Nous voici sur la route de Moiremont à Florent. Encore 6 km et nous serons arrivés.

Nous faisons une bonne pause et nous partageons le pain. Je suis avec Paradis et Sauvage. Les autres nous ont devancé. Nous mangeons de bon cœur le pain frais que nous connaissons ainsi qu’une boîte de pâté. Il est midi et le soleil donne toujours à notre grande joie. Un vieux fond de vin nous désaltère et en route !

Nous marchons, marchons de bon cœur. Il est 2 heures quand nous atteignons Florent.

Un grand va-et-vient de troupes y règne. Nous avons grand mal de nous orienter parmi ce peuple. Nous voyons des chasseurs à pied, du 96e d’infanterie, des artilleurs etc.…

Après bien des recherches nous trouvons un écusson de notre régiment qui nous dit où se trouve le deuxième bataillon : dans la ferme-château (voir topo Florent tome IV  [ci-dessous]).Plan14-11Florent En route nous voyons Verleene, l’agent de liaison de la 6e compagnie. Il nous indique une maison où se trouve la liaison. La maison est située face à un coin du concert de la 4e division. Nous entrons dans une pièce assez vaste où nous trouvons nos amis, Gallois, Jombart etc.… Gauthier est occupé à faire popote. Quelques chaises sont là. Nous nous installons au coin du feu heureux de pouvoir nous asseoir et avaler un quart de café. La route m’a légèrement fatigué.

Jombart me dit que tout le bataillon est logé dans la ferme-château avec les officiers qui ne sont installés que d’une façon rudimentaire.

Le village est occupé par les troupes d’un autre corps d’armée que le nôtre. Nos états-majors sont partis, et il a eu toutes les peines du monde, le cher fourrier, à placer le bataillon dans un coin qu’on voulait lui refuser. Les autres bataillons ont été d’ailleurs dans le même cas, mais ils sont déjà partis à la Grange aux Bois.

 Extrait de la carte d’état-major – Source : Géoportail

Pour nous il a trouvé la maison qu’habitaient depuis notre arrivée dans l’Argonne les trois vaguemestres* du régiment. Nous sommes encore les mieux lotis.

Gallois me raconte qu’il est arrivé à 11 heures après avoir manqué « d’y passer » à la cote de la Harazée. Il ajoute qu’un obus est tombé sur une colonne de territoriaux en marche sur la Harazée, tuant douze hommes. Nous avons eu raison donc de prendre la route de Moiremont.

Je vais voir Mascart qui se trouve dans une grange en face avec les autres agents de liaison. Je lui donne quelques affaires à nettoyer.

Soudain nous entendons la musique. Je me dirige vers la place ; c’est le 96e qui donne une aubade. Je vois nos officiers ; je salue le capitaine Sénéchal qui est rétabli et loge toujours au presbytère. J’aperçois quantité de jeunes sous-lieutenants, un peu godiche dans leurs uniformes tout neufs. Ce sont les saint-cyriens de la promotion « croix du drapeau », de jeunes Marie-Louise qui n’ont pas encore vu le feu.

Je rentre en visitant notre ancienne salle de spectacle. Ce n’est plus qu’une vulgaire grange ou sont cantonnées des troupes. Adieu aussi, chic concert ! Tout cela sent le départ et tu ne nous reverras plus de longtemps sans doute.

La soirée se passe autour de la table à sabler notre « pénard » avec le vaguemestre en attendant de boire le bon vin du repos. La longue route nous a creusé l’estomac et nous mangeons de bon appétit.

Vers 8 heures, Gallois est appelé au bureau du colonel. Une demi-heure après il rentre un peu ennuyé. Les trois adjudants de bataillon partent avec l’officier de cantonnement* demain matin à 5 heures. Ils doivent se munir d’une bicyclette et filer au-delà de Sainte-Menehould dans des villages dont le nom n’a pas été donné, mais qu’ils connaîtront demain. Ils y feront le cantonnement ; le régiment arrivera vers 2 heures après-midi.

Gallois repart vers le capitaine Sénéchal. Il rentre bientôt me déléguant ses pouvoirs. Me voici bien loti de nouveau. Dans tous ses états le pauvre Gallois se voit perdu. Enfin Caillez lui cède la bicyclette et nous nous chargerons de faire porter son fourniment aux voitures.

Allons un quart* de café ; une note fixant le départ pour demain 9 heures. Et nous communiquons à nos commandants de compagnie heureux du départ car ils sont dans une vulgaire masure. La maison d’habitation est occupée par des officiers du nouveau corps d’armée qui nous succède.

Je rentre et nous nous couchons à même le plancher roulés dans nos couvertures autour du foyer.


[1] ordonnance : Soldat attaché à la personne d’un officier pour l’entretien de ses effets, de ses armes et de son cheval.

17 janvier

Relève* des tranchées.

Au petit jour vers 6 heures je me rends comme la veille près le capitaine Claire pour le compte rendu du matin. Il me manque celui de la 8e. Paradis, le caporal fourrier, ne tarde pas à me l’apporter. Il se plaint que par là on a de la boue jusqu’aux cuisses.

Mascart dans notre abri fait un grand feu pour sécher nos couvertures qui durant la nuit ont reçu de l’eau et qui sont trempées.

Gauthier ne tarde pas à s’amener. Il est toujours le bienvenu. Jombart nous annonce que nous serons relevés ce soir ; il le tient de l’adjudant du ravitaillement Cousinard. Celui-ci a reçu ordre de ne pas amener le ravitaillement ce soir à la Harazée.

Je vais immédiatement donner « le tuyau » au capitaine Claire. Ce doit être vrai, car nous en sommes au septième jour de tranchées. Le capitaine Claire appelle Legueil qui passera probablement sergent fourrier* à la 6e compagnie. Un agent de liaison* lui est adjoint, Verleene.

La liaison se transforme petit à petit. Nous avons Gallois, adjudant de bataillon, Jombart, Sauvage et moi sergents fourriers, Legueil et Paradis caporaux fourriers, Mascart, Verleene, Frappé et Garnier, agents de liaison, les deux cyclistes Caillez et Crespel, René le mitrailleur et Gauthier notre sympathique cuisinier. Legueil ne tardera pas à avoir les baguettes de sergent fourrier et Verleene sans doute celles de caporal.

Les cuisiniers des 5e, 6e et 7e compagnies passent. Je salue l’adjudant Culine qui revient. Il ne peut rester inactif à la Harazée et préfère les tranchées. Je l’admire.

Gallois ne tarde pas à rentrer. Il préfère son poste à celui de chef de section.

Vers midi une note assez longue à copier nous arrive. Le lieutenant-colonel Desplats salue le régiment à la tête duquel il est placé définitivement. La relève aura lieu ce soir. Les commandants de compagnie resteront jusqu’au lendemain matin. Quant aux compagnies elles iront à Florent. Le grand repos a sonné pour nous ; nous irons nous reposer à l’arrière.

Heureux je vais moi-même communiquer la note au capitaine Aubrun tout heureux de n’avoir plus la responsabilité de son coin que durant quelques heures.

Le capitaine Claire vers 5 heures envoie la liaison en second avec Jombart à Florent pour faire le cantonnement. Quant aux fourriers Sauvage, Legueil, Paradis et moi, nous restons jusqu’au lendemain avec les cyclistes et l’agent de liaison de mitrailleuses.

Ainsi dit ainsi fait. Nous nous mettons tous après le départ ensemble dans le plus bel abri, laissons les autres à la disposition de ceux qui viendront nous relever.

À la nuit tombante des officiers arrivent. Ils sont d’un autre corps que le nôtre. Longtemps ils confèrent avec le capitaine Claire puis nous les conduisons au PC de chacun de nos commandants de compagnie. C’est avec un cri de joie que le capitaine Aubrun accueille son successeur. Je descends au PC du bataillon amenant avec moi l’agent de liaison par section. Ce n’est pas facile dans la nuit. Plus d’une fois je fais des chutes et m’aplatis dans l’eau. Mais qu’importe, on est relevé et on va à l’arrière. Quelle chance !

Quand j’arrive, je trouve les agents de liaison du bataillon qui nous relève. Ceux-ci s’installent et m’annoncent que le bataillon n’est pas loin. Il peut être 8 heures du soir.

Une heure après, les éléments de tête arrivent. Je suis appelé par le capitaine Claire qui me donne quelques explications. Je prends avec moi mes agents de liaison des quatre sections qui sont confiées aux quatre chefs de section de la compagnie de relève. Je prends la tête de la colonne et en route !

Vers 10h30 la 5e compagnie passait se dirigeant sur Florent. Quant à moi, ma besogne terminée, je me frottais les mains près du foyer de notre gourbi*, heureux d’avoir fini le premier. Terminé le cauchemar du bois de la Gruerie ! Un repos d’un mois, c’est le rêve ! Jamais je n’aurais espéré cela ! En un mot, que je suis heureux ! Je suis de nouveau rappelé par le capitaine Claire pour conduire une demie compagnie à l’emplacement occupé par le sergent Tercy lors du premier séjour (voir topo tome VI [ci-dessous]) tandis que Sauvage conduit une autre fraction à l’emplacement de la 7e.

TomeVI-planFneMadameAvec bien du mal j’arrive à mon but après m’être cassé le nez sur des éléments du bataillon relevé. Les boyaux de ce côté sont de vrais ruisseaux. Je m’enfonce jusqu’aux genoux. Paradis avait raison de se plaindre.

16 janvier

Le commandant Desplats est nommé lieutenant-colonel et chef du 147e

Je me lève à 5h30. Heureux suis-je en dormant d’avoir pour ainsi dire l’intuition de l’heure. Je vais trouver le capitaine Claire pour le compte rendu du matin. Le capitaine occupe un gourbi* à deux pièces : la première lui sert de bureau et de salle à manger ; il s’y trouve une table et deux chaises ; la seconde lui sert de cuisine et de chambre à coucher ; il y a de la paille, une chaise et un foyer. Il loge là-dedans avec Stewart, son ordonnance.

a6_pcEnveloppé dans une énorme peau de bique, le capitaine se lève. J’ai les comptes rendus de la nuit des compagnies : nous faisons donc le nôtre que nous envoyons pour 6 heures au PC du colonel.

Le capitaine Claire m’annonce que le commandant Desplats a reçu hier le grade de lieutenant-colonel et la ratification du commandement du régiment.

La journée se passe tranquille. Je cesse de poster un homme pour observer l’arrivée du colonel Desplats. Je juge que les défenses accessoires [1] sont assez fournies : d’ailleurs tout le fil de fer donné était placé.

179_001Quelques notes arrivent que je fais communiquer aux compagnies.

Jombart me remet des lettres de ma famille. On y déplore toujours la disparition de mon cousin [Louis] [2]. J’ai émis la thèse qu’il pourrait être prisonnier. Tous y croient là-bas et je n’ai garde de leur dire le contraire [2].

Dans l’après-midi, une scène admirable se passe. Nous entendons des coups de feu. Aussitôt le capitaine Claire m’envoie là-haut voir ce qui s’y passe. Je m’élance donc au gourbi du sous-lieutenant Gout et essoufflé lui demande ce qu’il y a. « Rien » me répond-il « des coups de feu, mais nous sommes en guerre, mon brave ! » Je cours littéralement dans le dédale de la tranchée et tombe chez le capitaine Aubrun qui dort paisiblement. Je le réveille et lui demande ce qu’il y a lui expliquant rapidement ce qui se passe. Il envoie ses agents de liaison ; j’attends quelques minutes. Rien non plus, tout est au plus calme.

Je rentre donc. En descendant la cote qui mène au PC du bataillon je rencontre le capitaine Claire envoyé par le colonel Desplats. Au téléphone on dit qu’il n’y a rien : le colonel ne veut pas le croire. Je dis au capitaine Claire qu’il n’y a absolument rien d’anormal, et il redescend avec moi en haussant les épaules.

Mais où le fou rire me prend, c’est voyant dans la tranchée qui barre la route derrière la barrière de fil de fer fermée, toute la liaison les fusils braqués dans notre direction avec le colonel qui va et vient derrière braquant ses jumelles.

De celle-là je ne suis pas encore revenu.

Nous rentrons tandis que le colonel file vers son PC où sans doute tout le monde est également en armes.

Vers 4 heures, passe sur un brancard mon ami le sergent Pellé qui a un éclat de bombe au pied. Il me serre la main au passage en me disant : « mon vieux ! J’ai la blessure filons ».

Après le départ des cuisiniers, il se met à pleuvoir : joli temps ! Je parle avec le capitaine Claire ; celui-ci me dit qu’en effet nous aurons un long repos après cette relève. Cela me comble de joie.

Il pleut toute la soirée, et malgré sa bonne toiture le gourbi laisse filtrer quelques gouttes d’eau. Cela n’est rien après tout à côté de la douche du soir de la relève.


[1] défenses accessoires : Les défenses accessoires désignent les obstacles dressés au devant des tranchées pour se protéger des attaques ennemies ou les canaliser.

Pour en savoir plus : http://www.wiki-anjou.fr/images/1/17/Genie_1915-1918_museedugenieangers.pdf

[2] mon cousin Louis : comme l’atteste la carte postale ci-dessous (non datée), reçue par Émile Lobbedey, ses proches espèrent toujours que son cousin est vivant et prisonnier des allemands. Alors que lui même ne semble pas trop y croire…

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15 janvier

De grand matin René part suivi de Mascart armé d’une hache afin de couper quelques gros rondins, car il faut songer à se refaire un toit. Une heure après tous deux reviennent, pendant que moi-même j’ai coupé des branchages. Nous nous mettons donc à l’œuvre en attendant l’arrivée de notre cuisinier.

À 9 heures il n’y paraissait plus et de nouveau nous pouvions nous dire «  chez nous », nous promettant bien cependant de ne plus faire de feu d’enfer.

Gauthier s’amène un peu tard. Chacun lui raconte l’histoire de la flambée de la veille. Le capitaine Claire l’apprenant rit beaucoup lui-même.

Jombart nous annonce qu’il a reçu du ravitaillement une petite couronne qu’il a placée cette nuit même sur la tombe de Jean Carpentier. Mon pauvre ami repose en paix !

Une nouvelle alerte nous procure la joie de poser quelques fils de fer. Il est certain que pour passer là, il faudrait une bonne préparation d’artillerie.

À midi nous mangeons. Mascart va communiquer une note et m’annoncer que ce matin le chef de la 4e section, le sergent N… a été tué dans la tranchée d’une balle au front au moment où il portait à ses lèvres un quart* de café. Encore une de mes connaissances qui est partie sans avoir dit « ouf ! »

Tir en préparation avec ces deux Minenwerfer légers.

Vers 4 heures avec les cuisiniers descend l’adjudant Culine. Il a été enterré à moitié par une Minenwerfer [1]. Il part à la Harazée sur l’ordre du capitaine pour se remettre un peu.

À 5 heures sur l’ordre du commandant Desplats à qui on a rendu compte, l’adjudant Gallois part pour remplacer Culine. Je le remplace en attendant comme adjudant de bataillon, Mascart fera l’agent de liaison* seul.

De ce coup je suis en contact direct avec le capitaine Claire pour les comptes-rendus.

Le soir tombe. Nous mangeons et nous couchons ayant soin d’éteindre notre feu, tant nous avons la frousse d’avoir la même farce que hier soir.

14 janvier

Je me lève vers 3h30. Il fait encore nuit noire. Je pars seul dédaignant de prendre mon second avec moi bien que cela nous soit permis pour les rondes. Je vois successivement le sous-lieutenant Gout, le capitaine Aubrun et le sous-lieutenant Carrière qui loge avec lui. Quant à la 8e je la juge trop éloignée. Cela m’a pris 3 quarts d’heure. Dans la tranchée, les sentinelles veillaient. Je puis donc mettre en conscience « route faite de 3 heures à 5 heures. Rien à signaler ».

Je m’étends donc près du brave Mascart qui dort comme un bienheureux. Il fait petit jour quand je me réveille.

Nous avons la visite du commandant Desplats, mais il nous trouve sarclant, piochant et son visage exprime la satisfaction. Inutile de dire que la sentinelle* était à son poste et l’avait vu arriver. Il appelle cependant l’adjudant Gallois et lui dit de nous faire poser des fils de fer au carrefour afin de consolider les défenses accessoires qui s’y trouvent déjà. Nous allons donc au PC du secteur qui se trouve à deux pas et ramenons des rouleaux de fil de fer barbelé.

Une autre visite plus agréable est celle de Gauthier autour duquel nous nous rassemblons aussitôt.

Puis nous nous mettons à l’œuvre et déployons le fil de fer. Plusieurs fois il faut risquer de s’enliser pour atteindre tel piquet afin d’y attacher le fil dont les pointes nous piquent les mains. Quant aux quatre martyrs des compagnies détachées au colonel, mon Pignol en tête, ils creusent la tranchée destinée à barrer la route avec un acharnement qui tient du désespoir.

Le commandant repasse, heureux de nous voir nous démener. Quelques minutes après nous rentrons dans nos Kania*, un rouleau de fil de fer à portée de la main prêts à bondir au moindre signal de notre observateur qui est à son poste pour deux heures et sera relevé par l’un d’entre nous.

gayraud-30Le temps est brumeux mais non pluvieux. C’est un avantage. Le capitaine Claire avec son téléphone ne sort pas de son trou.

Vers 10 heures, une mauvaise nouvelle nous parvient : Menneval est blessé à la tête. Peu grièvement, il est vrai, et heureusement. Il file vers le poste de secours qui se trouve sur le layon conduisant à la Harazée. Il fut blessé dans le boyau conduisant aux 5e et 7e et 6e.
À nous de prendre nos précautions quand nous communiquerons.

Jombart me remet au moment du repas une carte de l’ancien sergent Major de la 8e Godin en traitement à Clermont-Ferrand. Il déplore la mort de Jean Carpentier nous avons également aujourd’hui des Bulletins des armées de la République et quelques Echo de l’Argonne notre journal du coin qui est bien intéressant.

N0110075_JPEG_19_19DML'Echo de l'Argonne : le mieux informé de toute la région / gérant D.

L’après-midi je vais voir le capitaine Aubrun et lui porter tous ses papiers qui distraient et font oublier un peu les moments pénibles à passer.

Dans l’après-midi nous avons alerte et les défenses du ravin gagnent quelques fils de plus. Le commandant Desplats arrive escorté de quelques hommes qui portent un cadre rempli de fil de fer barbelé, cadre fait de plusieurs gros rondins. Il s’agit de poser cela sur le layon devant la tranchée qui le barre de façon à en faire une espèce de porte. Les poilus* se mettent à l’œuvre, tandis que le commandant rentre à son gourbi*, ce que nous faisons également en riant d’un air entendu. Nous avons trouvé le bon truc, c’est ce qu’on appelle le système D.

La journée se passe calme. Le soir tombe et entraîne avec lui le départ de nos cuisiniers et de ceux des compagnies. Je vois Jamesse mon caporal fourrier suivi de la longue file de ses cuistots. Quant à nous, nous baissons la toile de tente de l’entrée du gourbi : nous voici chez. Un bon feu flambe au fond de l’abri et on s’accroupit autour en attendant de chauffer la popote*.

La soirée se passe. Nous mangeons et nous couchons. Mascart a mis du bois sur le feu ; celui-ci durera une bonne partie de la nuit.

Mais soudain le cataclysme imprévu cette fois et toujours redouté éclate. Je me réveille : tout le toit est en flammes. Quelle scène ! Aussitôt je saisis mes couvertures sors et monte à flanc de coteau afin de jeter celle-ci sur le foyer d’incendie pour l’étouffer. Mascart et René courent au ruisseau qui se trouve à 20 m, appelant à l’aide toute la liaison, et amènent dans les marmites l’eau qu’ils déversent sur les branches qui flambent. Enfin après vingt voyages, aidés de Paradis et de Sauvage, nous arrivons à éteindre le tout. Quelle émotion !

D’abord la peur d’être repéré par la lueur, puis celle d’attraper une sérieuse algarade [1]. Émotion aussi non moins forte quand nous constatons les dégâts faits à notre demeure. Je suis littéralement désolé. Une bonne partie du toit est consumée ; quant à l’intérieur il est rempli d’eau. Jusque minuit nous travaillons à réinstaller l’intérieur et à le remettre en état. Quant au toit, nous laissons à demain le soin de le reconstituer. Nous nous couchons donc mélancoliques et moi surtout car mes couvertures sont en partie brûlées. Enfin, « quand le vin est tiré, il faut le boire » et « à la guerre comme à la guerre »


[1] algarade : Altercation vive et inattendue avec quelqu’un. (Larousse.fr)