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26 septembre

Au très petit jour, nous sommes réveillés en sursaut par une fusillade intense. La relève* des compagnies du bataillon commençait à se faire.

Aussitôt, je pars vers le capitaine Aubrun. Je traverse rapidement le boqueteau à gauche de la route dans lequel se trouve une portion de la compagnie dans les tranchées* face à Melzicourt. Je vois les hommes tirer. Des balles sifflent à mes oreilles. Enfin j’arrive au capitaine. Celui-ci me donne un instant ses jumelles. Gallica-Argonne-Observ2Je vois à 1200 mètres une ferme désolée, d’où sortent quantité de boches dont les uns arrivent sur nous, les autres sur le bois d’Haulzy. Le capitaine déclare que nous n’avons qu’à tirer pour tuer le plus de monde, n’ayant rien à craindre à cause de l’Aisne qui nous sépare. Quant au bois d’Haulzy, c’est une autre question.

Extrait de la carte d’État-major – Source : Géoportail

La 7e compagnie renforce les lignes et bientôt Rigault rejoint Aubrun.

Je rends compte au commandant pour revenir bientôt après, malgré les rafales d’obus.

J’assiste des tranchées à un spectacle inoubliable : les coloniaux qui tenaient le bois d’Haulzy, ayant laissé approcher l’ennemi, déclenchent tout à coup un feu infernal à en juger par le nombre de boches qui tombent et la fusillade qui crépite. Tout ceci se passe à 800 mètres de moi. Aussitôt après, nous entendons des cris : ce sont les coloniaux qui contre-attaquent à la baïonnette et enfilent les boches survivants qui, les bras levés, se rendent.

Gallica-Argonne-chargeDu coup, l’ennemi, qui voulait avancer sur nous et qui se tenait sous notre feu commençant des tranchées, rebrousse chemin en hâte vers la ferme où il est aux prises avec les coloniaux qui les repoussent.

Il peut être 8 heures quand notre artillerie tire sur la ferme. On est aux aguets et on voit des fuyards quitter les décombres. On tire à 1000 mètres sur eux. Tout le monde tire en rigolant et le capitaine fait le coup de feu comme nous.

Je suis à peine rentré au PC du commandant pour lui rendre compte que nous recevons des obus en quantité. Nous en avons jusque midi. C’est le tir des représailles. Nous n’avons pas encore eu de pertes jusqu’ici.

Jamais après-midi n’a été aussi calme.

Le soir tombe mais il n’y a pas de relève*. Toutes les compagnies doivent rester en ligne en cas de nouvelle tentative de l’ennemi.

Les cuisiniers partent quand même, comme à l’habitude.