9 novembre

Vers 4 heures 30, nous reprenons la route à travers bois. Le temps est propice. Le secteur est calme et nous n’entendons pas de balles siffler. Par contre il fait un froid de loup ; le temps est à la gelée.

Je suis heureux d’être arrivé pour me chauffer au foyer préparé par Blanchet.

Il a gelé un peu la nuit, cela est préférable à la maudite pluie.

Vers 9 heures, des mulets de mitrailleuses apportent quelques bottes de paille. J’en porte une au capitaine Aubrun qui me remercie chaudement.

Son installation est presque terminée et son gourbi*, relié par un long boyau à la tranchée de première ligne, ressemble à un château fort. Un foyer brûle jour et nuit. Je m’attarde un peu afin de profiter de la chaleur.

Dans un coin, un lit de paille ; dans le coin opposé, un peu de paille étendue, c’est Lannoy qui couche là. À côté, un autre gourbi qui abrite la liaison. L’installation est complète.

Vers 4 heures, c’est le défilé des caporaux et de leurs cuisiniers. Ceux-ci se hâtent de filer, n’aimant pas beaucoup l’odeur des tranchées et désirant faire le parcours du bois vers la Harazée en y voyant clair. Huvenois accompagne Gauthier et à René, nos braves popotiers.

Je change de gourbi, l’abandonnant à deux officiers du 272e arrivés en renfort avec leurs compagnies en deuxième ligne. Ceux-ci me remercient et je me retire dans un gourbi vacant, moins beau peut-être, mais plus petit et plus chaud. On s’installe Blanchet et moi.

Le temps est toujours à la gelée. Heureux sommes-nous de pouvoir faire un peu de feu.

Vers le soir, je vais faire un brin de causette avec le capitaine. Celui-ci est content. Tout va bien. L’ennemi lance quelques bombes de temps en temps. On riposte énergiquement et on tire peu.

De temps en temps, un sous-officier arrive et vient se chauffer au feu 20 minutes.

Dans la nuit, un sergent de la 6e compagnie, de mes amis du pays, Vanholme, passe, blessé grièvement, sur un brancard.


Sergent Vanholme mars 1915

[1] sergent Vanholme : il s’agit de Abel VANHOLME, évoqué plus en détail ici :
http://147ri.canalblog.com/archives/2014/04/19/29694542.html .

Christophe Lagrange nous apprend, sur son site dédié aux hommes du 147e R. I. : http://147ri.canalblog.com/, qu’Abel VANHOLME avait été amputé de la main droite après que celle-ci fut arrachée par un pétard lors des combats du Bois de la Gruerie le 1er novembre 1914.


 

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