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11 février

J’ai passé une bonne nuit et ressens à peine mon bras. Repos ce matin pour la compagnie. J’en profite pour achever la distribution des képis et passe ma matinée au magasin. Je me retrouve à table tout à fait rétabli. Le repas se passe comme à l’ordinaire avec saillies, taquineries. Lannoy nous raconte qu’il fut pris à partie par le capitaine au sujet de notre popote*. Pourquoi tous les sous-officiers n’y assistaient pas ? Lannoy s’en tire bien en disant simplement la vérité : manque d’entente, manque de place, manque de ressources de la part de certains. Le capitaine n’a plus soufflé mot.

À 13 heures, la place est vidée. Nos amis s’en vont à l’exercice. Une heure après, nous recevons la visite de Mascart. Demain marche militaire du bataillon, 15 km. Départ à midi.

À la rentrée de l’exercice, le capitaine vient nous voir pour signer les pièces quotidiennes que d’ailleurs Lannoy a le privilège de signer en son absence car il imite la signature à la perfection. Nous lui montrons l’ordre pour demain. Donc rassemblement à 11 heures 45, cuisiniers, caporal d’ordinaire et sergent-major, tout le monde marche. Quant à moi, je marche avec la liaison du bataillon.

Demain matin, repos pour les hommes, préparation à la marche.

Il est 4 heures 30. Nous bouclons les cahiers et laissant Jamesse à la garde du logis, nous filons voir le débit La Plotte que je n’ai vu hier et avant-hier.

Nous sommes les premiers arrivés et nos amis nous rejoignent bientôt et nous passons deux heures agréables.

Nous rentrons vers 7 heures en bande. Lannoy passe à l’épicerie pour acheter différentes choses pour Licour qui fait le tailleur pour la compagnie.

Nous nous mettons gaiement à table. Culine ayant rencontré les sergents du génie, son camarade, l’amène et il mange avec nous à la fortune du pot.

Au dehors il pleut. Le mauvais temps se mettrait-il de la partie ? La soirée, vu notre invité, se prolonge un peu. Nous nous couchons à 10 heures.

8 février

À 6 heures, nous entendons le clairon. Debout ! Les cuisiniers ont déjà le chocolat prêt et Licour astique les affaires de l’un et de l’autre.

À 7 heures, selon l’habitude, chacun part à l’exercice. Nous recevons la visite de Brillant : il me faut ce matin à 9 heures aller chercher des fournitures à l’officier de détail. Voilà ma matinée occupée. J’avertis Jacquinot pour qu’il se tienne prêt et me rends chez Verley et Toulouse que je trouve encore couchés. Je leur dis que « C’est une honte » et les invite pour ce soir au nom de la popote*. Ils acceptent de grand cœur et seront prêts à 5 heures pour l’apéritif.

À 9 heures, je suis chez l’officier de détail et touche quantité de képis et quelques paires de souliers. J’entasse tout cela dans le magasin. J’assiste au retour de l’exercice de la compagnie. Réellement, elle a belle allure et on ne croirait pas que là-dedans la majorité sont des réservistes.

Le capitaine vient au bureau. Il nous montre, en criant, à Lannoy et à moi un papier du colonel Rémond, actuellement général de brigade, notre ex-colonel. Celui-ci le félicite et lui annonce qu’il est nommé chevalier de la Légion d’honneur. Notre cher capitaine est aux anges. Nul doute qu’aujourd’hui, la nouvelle paraîtra à l’ordre du régiment.

Du coup, Lannoy demande au capitaine un cochon pour la compagnie. On compulse le cahier d’ordinaire sur lequel le capitaine a toujours l’œil fixé car il tient à son boni [1] comme à la prunelle de ses yeux. Puis d’un noble geste, il offre le cochon. On le remercie vivement. Delbarre et Massy sont aussitôt avisés de la bonne nouvelle : ils vont chercher l’animal.

10 heures, je vais lire le rapport qui ne contient rien d’intéressant quand Lannoy arrive avec la décision du jour signée du colonel. Les capitaines Claire et Aubrun sont nommés chevaliers de la Légion d’honneur, avec une citation presque identique qui a trait aux séjours dans la Gruerie du 16 au 19 septembre derniers et à l’attaque ennemie qui fut brillamment repoussée par la compagnie. Et dire que ces jours-là, Claire et Aubrun s’en voulaient à mort ! Je lis la chose à la compagnie dans la grange de la section Alinat et déclare aux poilus que le capitaine leur offre un cochon. C’est un enthousiasme général.

Après quoi, je rentre à la popote et nous nous mettons à table. J’annonce que ce soir, Verley et Toulouse sont des nôtres. Aussitôt, les cuisiniers sont chargés d’acheter ce qu’il faut et de nous faire quelque chose de convenable. Tous, nous espérons que le capitaine nous paiera le champagne, grâce à sa décoration. Au sujet de la citation, les avis sont un peu partagés. Mais on n’insiste pas. Culine cependant déclare qu’il aurait bien fait de faire citer quelques-uns d’entre nous qui lui ont fait gagner sa croix.

Au milieu du repas, Delbarre vient annoncer au sergent-major que le cochon est trouvé. Il indique le prix. Lannoy l’envoie à Charmontois-le-Roi s’entendre avec le capitaine.

À 1 heure, chacun part à l’exercice de nouveau tandis que je me plonge dans les paperasses.

Dans l’après-midi, je reçois des lettres de chez moi, ainsi qu’une lettre de Monsieur Roger de Marville, mon ancien hôte d’antan. Je lui avais écrit, ayant eu son adresse de son cousin, le sergent Prestat [2], vaguemestre*. Le brave homme est à Châlons-sur-Marne. Son jeune fils est engagé comme artilleur à Rennes. Il a quitté Marville à l’arrivée des Allemands avec son fils, laissant femme, filles et biens. Heureux est-il de m’annoncer qu’il a des nouvelles du pays : sa femme lui a écrit que Marville était respecté, le Kronprinz et l’empereur son père par la suite y ayant été bien accueillis et ayant promis de sauvegarder les habitants. La famille Roger loge des officiers qui se conduisent très bien. Tout ceci m’intéresse au plus haut point, car je songe souvent à Marville au temps où nous grillions de nous cogner avec les boches.

Enfin le soir tombe et Lannoy et moi, bouclons nos cahiers. C’est l’heure de la détente. Nos amis, revenus de l’exercice de l’après-midi, sont déjà chez La Plotte. Nous prenons Verley et Toulouse au passage et filons vivement là-bas amenant avec nous Jamesse que Rogery remplace. En route, nous rencontrons le colonel qui nous arrête, examine galons et dit à Jamesse qu’il devra les placer mieux que cela car ils vont s’effilocher. On salue.

Après une bonne heure passée ensemble au coin du feu avec les gendarmes, nous rentrons dîner, par un temps froid mais toujours sec.

La soirée se passe cordialement autour de notre table familiale. On jase, on parle, on rit beaucoup. Enfin on se quitte vers 11 heures après avoir épuisé notre répertoire de chansonnettes. Je me couche et hérite encore de Maxime et de Jamesse. Je ne puis les loger tous deux. Jamesse décide donc, en tant que plus jeune, d’aller coucher dans la paille avec ses couvertures. Maxime d’ailleurs n’a pas attendu cette décision pour dormir profondément.

Lannoy de son côté déclare dormir beaucoup mieux dans le foin que dans un lit. J’en suis content car je suis propriétaire du plumard de cette façon. Enfin, à 11 heures 30, toutes lumières éteintes, le calme [le] plus profond régnait, mais la table non desservie en disait long sur les libations de la soirée.

 

 


 

[1] boni : Somme qui excède la dépense faite ou l’emploi de fonds projeté.

[2] Prestat : Plus d’informations sur le Blog du 147e RI : http://147ri.canalblog.com/archives/2015/12/23/33093572.html

7 février

Je me réveille à 6 heures 30. Personne ne bouge. J’appelle Rogery et lui dis d’aller réveiller tout le monde. Il ne faut oublier qu’à 7 heures, il y a exercice.

Bientôt, un à un chacun s’amène. Quelles têtes ! Seigneur ! Culine a soif, soif. Il boit un litre d’eau.

Nos cuisiniers ont oublié l’heure eux aussi. Aussi mes amis partent-ils sans chocolat. Gibert réclame à boire. Il n’y a plus que de l’eau dans la maison ; la cave a été vidée hier soir (!!!).

Enfin, nous sommes pardonnables. Nous venons de faire cinq mois de guerre complets, et nous avons l’expectative de reprendre le harnais bientôt.

Les camarades ne tardent pas à revenir heureux. C’est dimanche aujourd’hui ; pas d’exercice. Personne ne le savait… Nous pouvons donc prendre le chocolat en toute tranquillité.

On s’astique donc, afin de se préparer pour la messe de 10 heures. Culine va se recoucher et Jamesse reprend lui aussi le somme interrompu.

À 10 heures, je vais à l’église avec toute la bande, excepté Culine qui dort toujours. Nous assistons à l’office dit par notre aumônier qui prononce un sermon. Un peu de musique se fait entendre. Beaucoup de monde assiste à l’office, l’église est remplie.

Après la messe, nous nous rendons prendre l’apéritif chez le maréchal-ferrant. On y rencontre des tas d’amis, entre autres Charbonneau, le sergent-major de la compagnie hors rang [C.H.R.*], qui doit être un pilier du café.

De retour chez la mère Azéline, nous trouvons Culine qui est redevenu lui-même. Rogery nous annonce que le sous-lieutenant Alinat est venu voir s’il n’y avait rien de nouveau. Le capitaine Aubrun est parti avec des amis passer la journée à Sainte-Menehould.

Nous nous mettons à table et mangeons gaiement en nous remémorant la bonne soirée de la veille. Pendant le repas, Mascart nous apporte quelques notes. On lit un ordre du jour du lieutenant-colonel Desplats à la mémoire d’un sous-lieutenant du 147e tombé au champ d’honneur, le sous-lieutenant Ardant du Masjambost de Limoges [1], tombé dans le bois de la Gruerie le 15 octobre 1914 ; un officier allemand, l’adversaire de notre camarade, Otto Brauer, a écrit au père, Monsieur de Masjambost, pour lui dire qu’il a recueilli le dernier soupir de son fils et qu’il peut être fier de son enfant car il a forcé l’admiration de ses ennemis eux-mêmes ; l’officier allemand ne peut s’empêcher de rendre hommage à temps de bravoure. Le colonel fait ensuite un dithyrambe*, nous disant d’être digne de nos aînés. Nous haussons les épaules. Notre écusson n’est-il pas garant de notre courage ? Et notre passé ne répond-il pas pour l’avenir ?

Nous quittons la table et nous rendons à Charmontois-le-Roi dans la famille Adam. Nous arrivons au milieu du café de nos camarades du génie qui aussitôt nous convient et nous prenons le café avec eux. Vers 4 heures, nous quittons pour nous rendre chez les amis de l’adjudant Culine où nous passons toute la soirée à vider quelques bonnes bouteilles de bière venues de Sainte-Menehould et à jouer aux cartes.324_001

Il est 7 heures quand nous rentrons à la popote. On parle à table de laisser de nouvelles invitations et il est décidé que demain ou après-demain nous convierons à notre festin Verley et Toulouse, secrétaires de l’officier payeur.

La soirée se passe gentiment ; mais à 9 heures, tout le monde est couché.


[1] Ardant du Masjambost : voir ci-après la fiche Mémoire des Hommes

FicheMDHarchives_B240748R

6 février

Au jour je suis debout. Lannoy et les amis s’amènent. On prend le chocolat traditionnel. À l’ouvrage, le bureau, tandis que la compagnie part à 7 heures à l’exercice.

Licour va chercher chez le tailleur du régiment, un de mes amis du pays, nos tuniques à Lannoy et à moi. Il nous les apporte brillamment galonnées. Nous les endossons aussitôt.

Réellement, maintenant, je suis nippé. Où est le temps où je n’avais plus de sac, plus rien, sinon cette malheureuse chemise sur le dos ?

À la rentrée de l’exercice, le capitaine s’amène et dicte le travail de l’après-midi. Exercice de 1 heure à 2 heures 30 sous la conduite du sergent Gibert. Nettoyage des armes à la rentrée. Revue d’armes à 4 heures par les chefs de section. Notre commandant de compagnie nous félicite sur notre tenue et se déclare satisfait d’avoir un bureau à [la] hauteur.

Après son départ, nous nous mettons à table. Culine arrive, relevé de son poste de garde. Il mange de bon appétit en tonnant contre toutes les chinoiseries du colonel Desplats. Lui aussi a eu la menace d’être cassé. Ce n’est certes pas une sinécure d’être chef de poste. Il nous fait bien rire en nous racontant une nouvelle aventure arrivée à Bibi, le sergent de la 8e, notre glorieux catéchumène que Culine a relevé.

Bibi étant chef de poste avec la section, reçoit la visite du chef de corps. Il fait sortir les hommes et leur fait présenter les armes. Le colonel l’eng… comme un pompier au sujet de la tenue des hommes qui n’est ni propre ni uniforme et lui dit en matière de conclusion « Vous serait cassé ! Vous êtes cassé ! Considérez-vous comme cassé ! ». Bibi ne bronche pas. Mais tandis que le colonel passe dans la grange qui sert de poste de police et continue son inspection, notre sergent tire posément son canif et en un tour de main enlève les deux morceaux de galons réglementaires qu’il a sur les manches.

Le colonel sort et au moment où il va filer, Bibi s’approche simplement de lui, « Tenez, mon colonel ! » lui dit-il en lui tendant les deux galons.

Celui-ci, fou furieux, les yeux lançant des éclairs, tonne, fulmine et lui crie « Vous aurez un mois de prison ! – Vous aurez deux mois ! – Vous serez dégradé ! – Vous passerez en conseil de guerre ! – ». Bibi, présentant les armes, ne bronche pas, mais il regarde lui aussi le colonel avec de grands yeux comme seul peut en avoir un vieux colonial. D’ailleurs, lui-même comme le colonel ont connu Madagascar et la Cochinchine. Bibi n’a-t-il pas la médaille de Chine, celle du Tonkin et celle du Maroc !

Et soudain, le colonel se reprend et se met à rire, puis de nouveau féroce « Vous resterez sergent, entendez-vous ; et je vous donne l’ordre de recoudre vos galons. Ce soir, vous viendrez me saluer chez moi et vous présenter ».

Le plus tranquillement du monde, Bibi fit rentrer le poste de police et le soir il allait voir le colonel. Il en revint enchanté et disait du coup « Mon ami le père Desplats ». Le colonel lui avait fait avaler plusieurs verres de vin, un dessert, le café et le pousse-café, l’avait fait asseoir à sa table, lui avait serré la main et déclaré qu’il était le meilleur sous-officier du régiment. Quel fou rire nous prend en entendant tout cela.

Enfin nous sortons de table. Au-dehors, il fait un soleil magnifique. Le temps est toujours beau. Nous n’avons pas encore eu une goutte de pluie depuis notre arrivée ici.

À 2 heures, nous sommes dans l’église. Celle-ci est remplie. Les officiers sont en tête, ayant derrière eux les sous-officiers. Tout le monde est assis. Le colonel s’amène vêtu de son énorme peau d’ours. On se lève. Notre chef de corps monte jusqu’au banc de communion et dignement se retourne en nous faisant signe de nous asseoir.

Durant une heure, il nous fera théorie comme à de vulgaires 2e classe ; il nous émettra ses idées qui pour le moins paraissent baroques. Il fait des phrases en se promenant dans l’allée centrale, tire sa peau d’ours, la remet, fait des gestes, des grimaces. Malgré tout le respect dû à l’autorité, nous ne pouvons nous empêcher de rire.

Il s’écrie soudain : « Quand je sors, qu’est-ce que je vois ? – Rien. »

En effet, il suffit qu’officiers ou soldats voient sa silhouette pour filer à l’anglaise d’un autre côté. « Quand je sors, qu’est-ce que j’entends ? – Rien ». Je vois le capitaine Sénéchal qui se tient les côtes.

À côté de moi, j’ai le capitaine Guepin qui dit « Ballot ! Ballot ! Ballot ! » et ressasse sans cesse la ritournelle.

« Le soldat français est toujours de service, 24 heures de service, toujours des service. »

« Le soldat ne doit causer que service, les sous-officiers que service, les officiers que service. »

« Le soldat ne doit penser qu’à la guerre, les sous-officiers qu’à la guerre, etc… »

Et sous la forme de commandements, il nous expose ses théories.

Durant une autre heure, il se met à interroger Pierre, Paul et Jacques ; mais à sa façon. Il prend Maxime Moreau et lui demande « Combien de temps par jour, un soldat est-il de service ? » – Maxime sans broncher répond « 24 heures ! »

À un autre sergent, il demande « De quoi un sous-officier doit-il parler ? »

Le camarade répond « De la guerre » et notre chef de lui dire « Non, mon ami, du service ! » Et il fait asseoir le sergent ahuri.

Recommandation est faite aux chefs de troupe, que ce soit compagnie ou fraction de compagnie, d’avoir sur eux le contrôle de leur unité. Et nous sommes libres !

Que d’impressions à se communiquer ! On peut en juger par les nombreux groupes qui se forment et les rires qui fusent.

Les officiers des 1er et 3e bataillons ne tardent pas cependant à reprendre la route de Sénard et Belval.

Nous rentrons au bureau où nos amis, Culine et autres nous suivent. Ils vont faire un tour pour leur revue d’armes, il est 4 heures, et nous donnent rendez-vous chez La Plotte.

Au bureau, Licour me remet une lettre de ma chère mère et un colis annoncé qui vient d’arriver. Je suis tout heureux d’y découvrir quelques friandises et en particulier un portefeuille très beau en remplacement du mien tout usagé. Ma mère me parle qu’elle possède chez elle un charmant monsieur, lieutenant Davion, chef de convois automobiles, avec qui elle converse longuement le soir et qui lui fait oublier un peu les tristesses de l’heure présente. Cette lettre me fait grand bien.

Gaiement, je pars donc avec Lannoy à Charmontois-le-Roi après avoir recommandé aux cuisiniers de faire un repas digne d’eux. En route, nous disons qu’il faudra songer à saluer un de ces temps la famille Adam qui peut croire que nous l’oublions. Chez La Plotte, la cuisine est remplie. Marie est à la place d’honneur et boit sec. Il est des plus intéressants ce vieux brave. À peine rentrés, le fou rire nous prend, il ne nous quittera plus jusqu’au coucher.

Nous passons 2 heures des plus agréables. Sur les instances de mes camarades et des gendarmes, j’attaque une chansonnette. C’est la première fois que je chante depuis la mort de Carpentier. Enfin, gaiement toujours, nous rentrons chez nous.

En route, Culine rencontre un de ses amis, sergent du génie. Pris d’une affection sans bornes, Culine l’embrasse et veut à tout prix qu’il l’accompagne à table. Nous avons donc de ce fait deux invités et Culine déclare noblement que « Plus on est de… fous plus on… on rigole » et en effet, on rit de bon cœur.

Nous nous mettons donc à table. Cette séance est indescriptible. Ce qu’il y a de vrai, c’est que nous sommes en gaieté et qu’à 11 heures Culine et Marie étaient reconduits par Cattelot et moi car on craignait un peu pour la faiblesse de leur vue. Quant à Maxime, il rentre gaillard en se moquant des deux malheureux : il oublie qu’ il y a deux jours il me demandait l’hospitalité. Lannoy est rouge comme un coq et nous avons toutes les peines du monde à le décider à aller se coucher. Quant à Jamesse, je le trouve dans mon lit à mon retour : ce soir il a oublié son gîte à Charmontois-le-Roi.

Je me couche, il est minuit. La table est un vrai champ de bataille. Nous avons vécu une séance mémorable et notre bourse s’est allégée de quelques sous.

6 février

Au jour je suis debout. Lannoy et les amis s’amènent. On prend le chocolat traditionnel. À l’ouvrage, le bureau, tandis que la compagnie part à 7 heures à l’exercice.

Licour va chercher le tailleur du régiment, un de mes amis du pays, nos tuniques à Lannoy et à moi. Il nous les apporte brillamment galonnées. Nous les endossons aussitôt.

Réellement maintenant je suis nippé. Où est le temps où je n’avais plus de sac, plus rien, sinon cette malheureuse chemise sur le dos.

À la rentrée de l’exercice le capitaine s’amène et dicte le travail de l’après-midi. Exercice de 1 heure à 2h30 sous la conduite du sergent Gibert. Nettoyage des armes à la rentrée. Revue d’armes à 4 heures par les chefs de section. Notre commandant de compagnie nous félicite sur notre tenue et se déclarent satisfaits d’avoir un bureau à hauteur.

Après son départ nous nous mettons à table. Culine arrive relevé de son poste de garde. Il mange de bon appétit en tonnant contre toutes les chinoiseries du colonel Desplats. Lui aussi a eu la menace d’être cassé. Ce n’est certes pas une sinécure d’être chef de poste. Il nous fait bien rire en nous racontant une nouvelle aventure arrivée à Bibi, le sergent de la 8e notre glorieux catéchumène que Culine a relevé.

Bibi étant chef de poste avec la section reçois la visite du chef de corps. Il fait sortir les hommes et leur fait présenter les armes. Le colonel l’eng…… Comme un pompier au sujet de la tenue des hommes qui n’est ni propre ni uniforme et lui dit en matière de conclusion « vous serait cassé ! Vous êtes cassé ! Considérez-vous comme cassé ! ». Bibi ne bronche pas. Mais tandis que le colonel passe dans la grange qui sert de poste de police et continue son inspection, notre sergent tire posément son canif et en un tour de main enlève les deux morceaux de galons réglementaires qu’il a sur les manches.

Le colonel sort et au moment où il va filer, Bibi s’approche simplement de lui « tenez, mon colonel ! » lui dit-il en lui tendant les deux galons.

Celui-ci fou furieux, les yeux lançant des éclairs, tonne, fulmine et lui crie « vous aurez un mois de prison ! – Vous aurez deux mois ! – Vous serez dégradé ! – Vous passerez en conseil de guerre ! – ». Bibi présentant les armes ne bronche pas, mais il regarde lui aussi le colonel avec de grands yeux comme seul peut en avoir un vieux colonial. D’ailleurs lui-même comme le colonel ont connu Madagascar et la Cochinchine. Bibi n’a-t-il pas la médaille de Chine, celle du Tonkin et celle du Maroc !

Et soudain le colonel se reprend et se met à rire, puis de nouveau féroce « vous resterez sergent, entendez-vous ; et je vous donne l’ordre de recoudre vos galons. Ce soir vous viendrez me saluer chez moi et vous présentez ».

Le plus tranquillement du monde, Bibi fit rentrer le poste de police et le soir il allait voir le colonel. Il en revint enchanté et disait du coup « mon ami le père Desplats ». Le colonel lui avait fait avaler plusieurs verres de vin, un dessert, le café et le pousse-café, l’avait fait asseoir à sa table, lui avait serré la main et déclaré qu’il était le meilleur sous-officier du régiment. Quel fou rire nous prend en entendant tout cela.

Enfin nous sortons de table. Au-dehors, il fait un soleil magnifique. Le temps est toujours beau. Nous n’avons pas encore eu une goutte de pluie depuis notre arrivée ici.

À 2 heures nous sommes dans l’église. Celle-ci est remplie. Les officiers sont en tête ayant derrière eux les sous-officiers. Tout le monde est assis. Le colonel s’amène vêtu de son énorme peau d’ours. On se lève. Notre chef de corps monte jusqu’au banc de communion et dignement se retourne en nous faisant signe de nous asseoir.

Durant une heure il nous fera théorie comme à de vulgaire 2e classe ; il nous émettra ses idées qui pour le moins paressent baroques. Il fait des phrases en se promenant dans l’allée centrale, tire sa peau d’ours, la remet, fait des gestes, des grimaces. Malgré tout le respect du à l’autorité, nous ne pouvons nous empêcher de rire.

Il s’écrit soudain « quand je sors, qu’est-ce que je vois ? – Rien. »

En effet, il suffit qu’officiers ou soldats voient sa silhouette pour filer à l’anglaise d’un autre côté. « Quand je sors, qu’est-ce que j’entends ? – Rien ». Je vois le capitaine Sénéchal qui se tient les côtés.

À côté de moi j’ai le capitaine Guepin qui dit « ballot ! Ballot ! Ballot ! » Et ressasse sans cesse la ritournelle.

« Le soldat français est toujours de service, 24 heures de service, toujours des service »
« Le soldat ne doit causer que service, les sous-officiers que service, les officiers que service »
« Le soldat ne doit penser qu’à la guerre, les sous-officiers qu’à la guerre, etc… »

Et sous la forme de commandements il nous expose ses théories.

Durant une autre heure, il se met à interroger Pierre, Paul et Jacques ; mais à sa façon. Il prend Maxime Moreau et lui demande « combien de temps par jour, un soldat est-il de service ? – Maxime sans broncher répond « 24 heures ! »

A un autre sergent et demande « de quoi un sous-officier doit-il parler ? »

Le camarade répond « De la guerre » et notre chef de lui dire « non, mon ami, du service ! » Et il fait asseoir le sergent ahuri.

Recommandation est faite aux chefs de troupe, que ce soient compagnie ou fraction de compagnie, d’avoir sur eux le contrôle de leur unité. Et nous sommes libres !

Que d’impressions à se communiquer ! On peut en juger par les nombreux groupes qui se forment et les rires qui fusent.

Les officiers de 1er et 3e bataillon ne tardent pas cependant à reprendre la route de Sénard et Belval.

Nous rentrons au bureau où nos amis, Culine et autres nous suivent. Ils vont faire un tour pour leur revue d’armes, il est 4 heures, et nous donnent rendez-vous chez La Plotte.

Au bureau Licour me remet une lettre de ma chère mère et un colis annoncé qui vient d’arriver. Je suis tout heureux d’y découvrir quelques friandises et en particulier un portefeuille très beau en remplacement du mien tout usagé. Ma mère me parle qu’elle possède chez elle un charmant monsieur, lieutenant Davion, chef de convois automobiles avec qui elle converse longuement le soir et qui lui fait oublier un peu les tristesses de l’heure présente. Cette lettre me fait grand bien.

Gaiement je pars donc avec Lannoy à Charmontois-le-Roi après avoir recommandé aux cuisiniers de faire un repas digne d’eux. En route nous disons qu’il faudra songer à saluer un de ces temps la famille Adam qui peut croire que nous l’oublions. Chez La Plotte la cuisine est remplie. Marie est à la place d’honneur et bois sec. Il est des plus intéressants ce vieux brave. À peine rentrés le fou rire nous prend, il ne nous quittera plus jusqu’au coucher.

Nous passons 2 heures des plus agréables. Sur les instances de mes camarades et des gendarmes, j’attaque une chansonnette. C’est la première fois que je chante depuis la mort de Carpentier. Enfin gaiement toujours nous rentrons chez nous.

En route Culine rencontre un de ses amis, sergent du génie. Pris d’une affection sans bornes, Culine l’embrasse et veut à tout prix qu’il l’accompagne à table. Nous avons donc de ce fait deux invités et Culine déclare noblement que « plus on est de… fous plus on… on rigole » et en effet on rit de bon cœur.

Nous nous mettons donc à table. Cette séance est indescriptible. Ce qu’il y a de vrai c’est que nous sommes en gaieté et qu’à 11 heures Culine et Marie était reconduits par Cattelot et moi, car on craignait un peu pour la faiblesse de leur vue. Quant à Maxime il rentre gaillard en se moquant des deux malheureux : il oublie il y a deux jours il me demandait l’hospitalité. Lannoy est rouge comme un coq et nous avons toutes les peines du monde à le décider à aller se coucher. Quant à Jamesse, je le trouve dans mon lit à mon retour : ce soir il a oublié son gîte à Charmontois-le-Roi.

Je me couche, il est minuit. La table est un vrai champ de bataille. Nous avons vécu une séance mémorable et notre bourse s’est allégée de quelques sous.

5 février

Je suis debout à 6 heures et envoie aussitôt Rogery au capitaine Aubrun pour lui demander ce que doit faire la compagnie.

Le capitaine répond par une note : « À moins d’ordres contraires, exercice tous les jours de 7 heures à 9 heures 30. Rapport à 10 heures. Exercice de 13 heures à 15 heures 30. Travaux de propreté et de nettoyage du cantonnement jusque 17 heures ». Ainsi donc, nous sommes fixés.

Mes amis arrivent. Ils ont à peine avalé le chocolat qu’il leur faut déguerpir pour l’exercice à 7 heures.

Je n’ai pas beaucoup de travail ce matin. J’en profite pour écrire longuement chez moi.

Jamesse s’amène et se faire réprimander par Lannoy : notre ami, c’est « le type qui ne s’en fait pas ». Il est 8 heures, est-ce une heure pour arriver au bureau ? Nous recevons la visite de Mascart qui nous fait savoir que nous relevons le poste de police à 10 heures. Vivement, Rogery part dans la direction prise par la compagnie afin d’informer le capitaine.

Dans la matinée, nous voyons passer sous nos fenêtres, venant de la direction de Sénard et y retournant, le 19e chasseur à cheval, colonel en tête, qui sans doute fait une marche manœuvre. Son passage nous fait passer une demi-heure agréable.

Une autre note me dit d’aller à 10 heures toucher de nouvelles fournitures. J’avertis immédiatement Jacquinot et vois passer Culine furieux d’être de garde avec sa section et de ne pas avoir été averti plus tôt. À qui la faute ? À l’adjudant de bataillon, ni plus ni moins.

Au moment où la compagnie rentre, je pars avec Jacquinot chercher les nouvelles fournitures. Le capitaine à cheval me demande où loge l’adjudant de bataillon. Je lui indique la demeure. Il pique des deux dans cette direction. Gallois va recevoir un nouvel abattage.

Je vois Bourgerie, sergent fourrier, le factotum de Lebeau, officier de détail. Il me sert le premier en bonnets de police de velours de toutes couleurs, pantalons de velours et pantalons bleus et j’hérite par-dessus tout d’une nouvelle douzaine de galoches.

Il est 11 heures. Nous nous mettons à table. On parle de lancer quelques invitations, vu que nous sommes bien installés et pouvons le faire. Nous avons chacun des camarades particuliers que nous inviterons chacun leur tour. C’est accepté de tous. Culine est malheureusement absent ; mais sûrement qu’il sera de notre avis. Levers part porter sa pitance à notre ami qui est de garde depuis 10 heures. Lannoy me dit que le capitaine lui fit des observations au sujet de la tenue des hommes qui aurait pu être meilleure. Culine d’une voix assez haute lui a répondu que ce n’est pas en avertissant à 9 heures qu’on est de garde à 10, après avoir éreinté les hommes durant 2 heures, qu’on obtient quelque chose. Il n’a pas peur Culine et des deux, je crois que le capitaine céderait le premier, car la première section de la compagnie c’est la section Culine. C’était comme dans le bois de la Gruerie : y avait-il un mauvais coin, dur à tenir… Culine !

Nous décidons d’inviter le sergent Marie pour demain soir ; c’est un vieux brave qui mérite une certaine condescendance de notre part.

L’après-midi se passe tranquille avec une visite du capitaine pendant que la compagnie est à l’exercice. Nous lui montrons une note du colonel disant que, les compagnies ayant touché des boutons, les hommes coudront une seconde rangée de boutons à leur capote bleue. Le capitaine appelle cela des chinoiseries et il a raison. Je lui rends compte également des fournitures touchées. Je reçois ordre de distribuer les calots et de garder le reste comme en-cas.

Au retour de la compagnie à 3 heures 30, je distribue donc mes bonnets de police par sections, et bientôt tous les poilus se baladent heureux de leur nouvelle coiffure.

« À moins d’ordres contraires, départ de la compagnie demain à 6 heures 30 pour service en campagne ». Nous avertissons nos amis et tous ensemble, il est près de 5 heures, nous filons chez La Plotte.

En route, je rencontre, oh surprise ! un de mes excellents amis de Lille, exdocteur des facultés, médecin auxiliaire au 3e génie qui a pris notre place dans Charmontois-le-Roi. Nous prenons l’apéritif ensemble et durant une heure, aussi heureux l’un que l’autre, nous parlons de Lille, des environs, de nos amis communs. Quelle joie de se retrouver ! Nous nous étions entrevus une minute le long d’une route lors de la marche en avant qui suivit la Marne. Il connaît le débit de Madame La Plotte et certes à placé son dévolu aussitôt sur lui, car il y a installé son poste de secours et sa salle de visite. Ainsi le café est sa propriété.

Nous prenons ensemble quelques verres de vin blanc et rentrons vers 7 heures, nous donnant rendez-vous un de ces jours. Lannoy a vu Culine qui est de notre avis pour les invitations. Marie est invité. Il accepte. Demain soir il y aura donc une petite fête. Levers n’oubliera pas de donner un bon rhum à notre maman Azéline afin que la bonne vieille dorme comme une marmotte.

Mascart vient du bataillon nous apporter quelques notes ; en particulier celle-ci, « Demain, à 2 heures, dans l’église de Charmontois-l’Abbé, réunion des officiers et sous-officiers ».

Rogery fait communiquer la note au capitaine et aux officiers. Nous nous couchons vers 10 heures.

3 février

Nous nous levons tôt ; le capitaine sans doute viendra avant le départ. Lannoy d’ailleurs doit faire la situation de prise d’armes.

Je m’habille rapidement et suis bientôt prêt à partir, imité par Jamesse qui arrive en coup de vent. Nous buvons rapidement le chocolat et rejoignons la 4e section. La compagnie s’en va.

Il est 5 heures. Nous partons par Charmontois-le-Roi, passons devant la maison Adam et filons vers Le Chemin, village situé à 4 km. Nous faisons une courte pause avant d’y arriver. Le temps est sec, il a gelé ; il fait bon marcher. Nous repartons : arrivés dans Le Chemin nous tournons à droite et faisons 3 km sur cette route. Nous arrivons ensuite à une intersection et prenons à droite vers Passavant.

Nous sommes arrivés car nous prenons à travers champs. Devant nous, nous avons un coteau. On s’arrête à 500 m du coteau et nous faisons la pause.

Le capitaine fait sortir les hommes au cor de chasse dans l’active, pendant que quelques hommes avec un sous-officier partent près des silhouettes afin de faire les marqueurs.

Section par section les hommes tirent sur silhouettes debout, puis à genoux. Pendant ce temps je prends le commandement de l’équipe des tireurs d’élite et fait une petite manœuvre.

C’est notre tour enfin. Quelques-uns d’entre nous font un tir de « perroquets » en montant dans les arbres. Une équipe tire ses huit cartouches à 400 m en trois bancs [?] successifs à genoux.

J’en fais partie et suis assez heureux pour faire trois rigodons.

La séance a duré 1h30. Pause d’une demi-heure. Nous rentrons comme nous sommes venus par le même itinéraire. Nous entrons dans Charmontois vers 11 heures, heure prévue.

Je rentre au bureau avec mes amis et nous ne tardons pas à nous mettre à table car nous avons gagné appétit.

Cet après-midi repos et petites revues de sections. En somme c’est la tranquillité.

À table nous sommes d’accord pour dire que Passavant est horriblement loin, pour un champ de tir. Il y a sûrement 8 km. Licour en particulier nous fait rire, car il est vanné. Dans son patois français flamand, il dit à Lannoy que la prochaine fois il devra l’exempter.

Nous recevons encore la visite Delbarre qui vient s’arranger pour quelques questions d’ordinaire. Lannoy lui promet le cochon demandé si souvent.

Dans l’après-midi, tandis que Jamesse va chercher au poste de secours les livrets individuels portés hier, je vais dire bonjour à mes amis Toulouse et Verley, secrétaires trésoriers qui se trouvent mes voisins. Je passe avec eux une heure à causer du pays si souvent l’objet d’incursions de Taube*. La famille de Toulouse est à Gravelines : la proximité de l’habitation située [à deux] pas de la gare de Dunkerque lui fait craindre des représailles.

En rentrant au bureau je trouve Brillant qui apporte quelques notes du bataillon. Demain après-midi, grande revue du bataillon par le colonel Desplats : chaque compagnie devant son cantonnement, tenue de campagne, pantalon bleu ; uniformité de tenue rigoureuse ; 5e compagnie : 15 heures. Demain matin chaque adjudant de compagnie présentera à 9 heures au colonel un homme type de la compagnie en tenue de campagne : sac, toile de tente et couverture roulée en fer à cheval, piquets de tente etc.…

Rogery va trouver le capitaine et ne tarde pas à rentrer. Le capitaine a la frousse. Quartier consigné ce soir, occupation du reste de l’après-midi à se préparer à la revue. Revue demain matin à 9 heures par le commandant de compagnie dans la tenue prescrite par le colonel. Tout le monde présent ; aucune exemption. L’adjudant Culine se présentera avec un homme de son choix au commandant de compagnie à 8 heures etc. etc. etc.…

Et voilà, il n’y a plus qu’à astiquer et réastiquer de nouveau. Nous sommes revenus au quartier en temps de paix.

Licour se charge pour nous, Lannoy et moi, de monter tout à hauteur. Lannoy l’exempte de la revue. La situation de prise d’armes sera juste quand même. Pendant la revue il se cachera au grenier. Le brave garçon en signe de reconnaissance astique avec ardeur.

Imagerie d'Epinal. Genre supérieur (hors groupes). Le 152e poilus, 1914-1915 : [estampe] / par Hansi - 1Quartier consigné : nous ne sortons pas ce soir. Cela nous peine. De ce fait nous mangeons plus tôt. À 6h30 nous sommes à table et comme chaque soir nous [nous] distrayons entre nous. On parle beaucoup de la revue de demain : la tenue ne sera pas uniforme, car les capotes neuves sont bleu ciel, les anciennes bleu foncé et les neuves sont en très petit nombre. Enfin, ne cherchons pas à comprendre.

Ce soir j’hérite du lit seul. Lannoy préfère aller se coucher dans le foin : il prétend qu’il y a de la vermine dans le lit. Très bien ! Je serai plus tranquille. Quant à la vermine, je suis sûr qu’il n’y en a pas. Enfin toujours content, je me vois seul dans le plumard. C’est un avantage. Jamesse s’en va à 8 heures. Bonsoir ! Et bientôt bonsoir à tous ; à 9 heures, lumières éteintes, nous étions couchés.