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7 mars

Repos aux abris Somme-Tourbe (Voir topo Tome I)
Capitaine Triol du 139e commandant du 2e bataillon

Je me réveille vers 7 heures du matin. Gauthier est là avec le café. Je ne puis m’empêcher de le féliciter.

Je sors après avoir remis avec bien du mal mes chaussures. Naturellement je ne vois aucun planton de la liaison sur la route. Je rentre alors en tonitruant. La lacune est comblée bientôt, mais le régiment est-il passé oui ou non ? J’attends espérant que non.

Je n’ai aucun goût à me nettoyer. Je suis si sale. Je vois le capitaine Delahaye qui fume une cigarette en tenue sommaire. Lui aussi est sale et cela me console un peu. Voici Crespel et caillez qui rentrent. Je leur demande s’ils ont vu le régiment. Ils me répondent négativement.

Voici vers 9 heures un chariot sur lequel j’aperçois le lieutenant Lebeau et quelques sapeurs ainsi que le caporal fourrier Bourgerie. On me dit que le premier bataillon suit.

Déjà des feux sont allumés et les cuistots d’escouade font bonne besogne avec les restes car hier il n’y eut pas de distributions.

Je vois ceux de la 5e, Lavoine, Licour, Chandelier. On m’offre du café que j’accepte de grand cœur.

Je vais saluer le lieutenant Collandre commandant la 5e. Il vient de se lever et me félicite « alors » dit-il « vous me quitter, car vous passerez adjudant de bataillon ». Je vois Jombart qui vient à la liaison ; il fait le sergent major, le fourrier et le caporal fourrier à la 8e. Je ne fais semblant de rien et suis aimable avec lui.

Enfin vers 10 heures, par le temps sombre qu’il fait et donne une certaine mélancolie aux lieux, je vois arriver des fantômes boueux, vrais paquets de qui se traînent. C’est le régiment. Dans quel état lamentable !

J’avertis aussitôt le capitaine Delahaye qui va causer au commandant du 1e bataillon. Des baraquements sont libres derrière nous. Ils font être vite occupés.

Je vois ensuite le commandant Vasson à cheval. Il fait de grands gestes en causant avec le chef du 2e bataillon. Je n’y entends rien et ne m’en préoccupe pas.

Je rentre me décrotter plutôt que d’assister au défilé lamentable des rescapés de Mesnil.

On mange peu de chose. Gauthier n’a rien. J’ai un morceau de pain de l’ordonnance et ouvre une boîte de pâté.

Vers 1 heure alors que j’étais absorbé par mon décrottage sans avoir pu encore me débarbouiller je suis appelé par le capitaine Delahaye qui me dit de rassembler les 4 fourriers et de le suivre dans 10 minutes.

Nous partons à cinq sur la route vers Somme-Tourbe puis un peu plus loin à 500 m prenons à travers champs sur la gauche. Nous descendons un ravin, traversons un petit ruisseau sur un pont de bois et montons une petite cote au haut de laquelle on aperçoit trois rangées de baraquements dont une partie encore en construction.

Ces baraquements seront notre cantonnement. J’hérite d’une lignée. Nous entrons et constatons avec plaisir qu’ils sont plus finis que les autres et mieux aménagés. Je divise en six : les quatre compagnies le poste de secours et la liaison du bataillon.

Une heure après chaque fourrier allait chercher sa compagnie pour l’installer.

Moi-même, avec Gauthier qui m’avait suivi, j’installais mon coin. Dégourdi Gauthier trouve quelques planches les place sur le sol. Le lit est tout trouvé. Le sac à la tête, les couvertures étendues, le fusil dans le coin avec le bidon et la musette accrochés. Je suis placé. Il peut-être 3 heures.

Mais quel brouhaha dehors ! C’est celui de l’arrivée de toute troupe qui s’installe. La liaison ne tarde pas à arriver. Je vois Cailliez, Crespel cyclistes, Frappé, Brillant, Garnier, agents de liaison des 7, 5, 8e, puis Jombart, Sauvage, Verleene fourriers de 8, 7, 6e ; avec Gauthier, c’est tout cela me fait neuf unités. C’est bien suffisant et je n’en demande pas plus. Je sors pour voir l’installation car j’ai déjà mon métier d’adjudant de bataillon à cœur. J’apprends que le capitaine Delahaye reprend la 3e compagnie et passe le commandement du bataillon au capitaine Triol du 139e nouveau venu. Aussitôt je vais dire au revoir au capitaine Delahaye. Je le trouve dans un baraquement réservé aux officiers et où pas mal de ceux-ci sont occupés à causer. Il me dit au revoir et me présente au capitaine Triol qui me reçoit aimablement et à qui je demande ses instructions pour le cantonnement. Il me dit de faire pour le mieux, selon l’habitude. Je rentre donc près de ma liaison et dicte quelques notes sur les cuisines, les feuillées* etc…

Je suis fatigué et m’étends tandis que Gauthier part aux distributions sur la route de Somme-Tourbe et qu’on annonce à grands coups de gosier dans tout le cantonnement.

Vers 6 heures je me présente au capitaine lui demandant ses instructions pour la nuit. Il est à table avec les officiers du bataillon dans le bâtiment de tantôt. Celui-ci est séparé en deux pièces. Dans la première il y a une vingtaine de couchettes et un foyer qui brûle ; dans la 2e quelque table et quelques bancs où les officiers sont occupés à prendre leur repas. Le commandant du bataillon me demande de garder la liaison sous ma main. Je lui dis que c’est fait. Je mérite de ce fait un très bien et puis disposer.

Je rentre près de la liaison heureux à la pensée de passer une nuit tranquille. Nous sommes près du poste de secours et héritons de la chaleur du foyer qui y est allumé. Nous aussi nous allumons le nôtre, trou creusé par le génie sous les planches qui ne peuvent prendre feu grâce à de la tôle dont elles sont recouvertes, avec tirage à l’extérieur. Chacun va barboter du bois. Gauthier revient des distributions avec Cailliez et Crespel ainsi que René qui en arrivant aussitôt à donner un coup de main au passage. Aussitôt flambe un bon feu. Il faut manger. On décide de faire des biftecks à fin de se coucher rapidement.

Il y a une porte en bois. Nous la posons à l’intérieur contre l’entrée. Il fait chaud aussitôt. Chacun a pu se procurer une planche qui le séparera de la terre humide. Nous sommes presque heureux tandis que nous avalons la viande à peine cuite arrosé d’un quart de « pinard ». Le café suit et bonne nuit !

Il est déjà 10 heures.

18 janvier

Séjour à Florent

Impossible de dormir, tellement je suis énervé ! et mouillé… Je fume cigarette sur cigarette ! Tandis qu’un à un mes amis rentrent plus ou moins boueux, le dernier est Paradis ; il peut être 2 heures du matin. Au-dehors c’est une allée et venue sans pareille de troupes qui chuchotent.

Allons, tout va bien ! Nous pouvons dormir jusque 7 heures, c’est l’heure fixée pour notre départ ! On s’étend et on s’endort pêle-mêle les uns sur les autres, la joie au cœur, et la tête remplie d’un avenir de félicité !

Il est 6h30. Nous sommes réveillés par des appels. C’est le capitaine Claire qui nous envoie son ordonnance [1], Stewart, on va partir.

Bientôt arrivent tout rieurs le capitaine Aubrun et le lieutenant Carrière, Gout et Vals. Le capitaine Claire les suit. Nous pouvons partir de l’avant. Adieu Gruerie ! Nous agitons nos képis en passant le petit pont de bois de Fontaine Madame.

Nous partons, déambulant dans la boue, mais avec une hâte fébrile de quitter ce mauvais coin où nous avons laissé tant des nôtres.

Non loin de la Harazée nous attrapons le colonel Desplats et le capitaine de Lannurien. Ceux-ci sont boueux comme nous et nous amusent par les contorsions qu’ils font pour ne pas s’aplatir dans les flaques d’eau. Nous arrivons dans la Harazée vers 8 heures. Un petit soleil semble saluer notre passage, cela nous fait plaisir. Ce qui nous plaît moins, ce sont quelques shrapnells que les boches nous envoient.

Nous ne nous arrêtons pas en conséquence dans ce coin peu hospitalier. J’ai un souvenir en passant pour Jean Carpentier. Il eût été si heureux, le pauvre, de filer aussi avec nous ayant l’expectative d’un long repos.

Les shrapnells* nous suivent et même des obus percutants* se mettent de la partie. J’émets donc l’avis qu’il serait ridicule de se faire tuer ou blesser ici. Nous laissons donc la cote de la Harazée, malgré Gallois qui veut y passer quand même. Quand Legueil, René, mitrailleur, Paradis, Sauvage, et Crespel le cycliste, nous prenons la route de Vienne le Château. C’est un détour de 10 km. Au moins nous serons à l’abri, et d’ailleurs nous avons pour nous toute la journée et journée de plus ensoleillée.

Nous filons donc rapidement sur Vienne-le-Château, en hâte car la zone quoique moins visée que la cote de la Harazée est fort dangereuse quand même. C’est d’ailleurs ici que dernièrement tombaient les obus lancés contre nos voitures de ravitaillement, spectacle auquel nous assistâmes étant dans la Harazée. Presqu’à l’entrée de Vienne le château, nous sommes dépassés par tous les officiers de notre bataillon. Eux aussi prennent notre route pour plus de sûreté.

Il est 8h30. Le temps est splendide ; sans doute le soleil sabre-t-il notre départ de l’Argonne et veut-il fêter comme nous le fameux repos qui nous met le cœur en liesse.

Nous nous arrêterons dans le château et entrons dans une maison abandonnée où quelques marsouins font popote*. Nous profitons de la pause pour faire du café. Il y a ici tout ce qu’il faut pour cela et les camarades de l’infanterie coloniale sont très complaisants.

Image illustrative de l'article Adolphe Guillaumat

               Général Guillaumat

Nous voyons passer un général de division avec tout son état-major et sa suite. Sans doute est-ce celui qui succède au nôtre, le général Guillaumat, et qui vient voir un peu ce que ses troupes doivent garder.

Le café bu, nous partons, tranquillement cette fois, car les obus sont rares de ces côtés. Nous marchons dans la direction de Vienne-la-Ville. Nous voyons à notre droite à 2 km sur sa hauteur le village de Saint-Thomas en ruine. Au carrefour de la route qui mène à Saint-Thomas, Pêcheur sergent secrétaire du colonel me dépasse à bicyclette en me criant bonjour. Décidément tout le monde suit notre idée et personne n’a aimé affronter la route de la Placardelle toujours balayée d’obus.

On continue. Bientôt nous rencontrons deux compagnies d’un régiment inconnu. Puis un galop de cheval nous fait tourner la tête. Aussitôt nous rectifions la position, c’est le colonel Desplats suivi du capitaine de Lannurien. Lui aussi prend notre route. En passant le colon nous crie aimablement « à Florent ! ».

Voici Vienne-la-Ville. Nous faisons une nouvelle pause. Réellement la route est longue. Nous avons abattu une dizaine de kilomètres et nous en avons encore 15 au moins.

Enfin nous repartons quand soudain quelle aubaine ! Des caissons d’artillerie nous dépassent à vide rentrant au cantonnement à Moiremont.

Une, deux ! Nous sommes dessus, blaguant avec les artilleurs, et chantant à tue-tête. Naturellement il n’y a pas de ressorts, on est un peu secoué, mais on est si heureux et il fait un si bon soleil. Nous arrivons ainsi à Moiremont. Il nous faut descendre, car les caissons s’arrêtent ici. N’empêche que cela nous fait 8 km de parcourus gaiement. Je me souviens de la boulangerie d’autrefois quand nous avons logé dans la ferme Hulion qui brûla la nuit. Si je pouvais avoir un pain frais. J’arrive, j’insiste et puis achète. Quelle bonne chère nous allons faire tout à l’heure sur le bord de la route en cassant la croûte.

Nous voici sur la route de Moiremont à Florent. Encore 6 km et nous serons arrivés.

Nous faisons une bonne pause et nous partageons le pain. Je suis avec Paradis et Sauvage. Les autres nous ont devancé. Nous mangeons de bon cœur le pain frais que nous connaissons ainsi qu’une boîte de pâté. Il est midi et le soleil donne toujours à notre grande joie. Un vieux fond de vin nous désaltère et en route !

Nous marchons, marchons de bon cœur. Il est 2 heures quand nous atteignons Florent.

Un grand va-et-vient de troupes y règne. Nous avons grand mal de nous orienter parmi ce peuple. Nous voyons des chasseurs à pied, du 96e d’infanterie, des artilleurs etc.…

Après bien des recherches nous trouvons un écusson de notre régiment qui nous dit où se trouve le deuxième bataillon : dans la ferme-château (voir topo Florent tome IV  [ci-dessous]).Plan14-11Florent En route nous voyons Verleene, l’agent de liaison de la 6e compagnie. Il nous indique une maison où se trouve la liaison. La maison est située face à un coin du concert de la 4e division. Nous entrons dans une pièce assez vaste où nous trouvons nos amis, Gallois, Jombart etc.… Gauthier est occupé à faire popote. Quelques chaises sont là. Nous nous installons au coin du feu heureux de pouvoir nous asseoir et avaler un quart de café. La route m’a légèrement fatigué.

Jombart me dit que tout le bataillon est logé dans la ferme-château avec les officiers qui ne sont installés que d’une façon rudimentaire.

Le village est occupé par les troupes d’un autre corps d’armée que le nôtre. Nos états-majors sont partis, et il a eu toutes les peines du monde, le cher fourrier, à placer le bataillon dans un coin qu’on voulait lui refuser. Les autres bataillons ont été d’ailleurs dans le même cas, mais ils sont déjà partis à la Grange aux Bois.

 Extrait de la carte d’état-major – Source : Géoportail

Pour nous il a trouvé la maison qu’habitaient depuis notre arrivée dans l’Argonne les trois vaguemestres* du régiment. Nous sommes encore les mieux lotis.

Gallois me raconte qu’il est arrivé à 11 heures après avoir manqué « d’y passer » à la cote de la Harazée. Il ajoute qu’un obus est tombé sur une colonne de territoriaux en marche sur la Harazée, tuant douze hommes. Nous avons eu raison donc de prendre la route de Moiremont.

Je vais voir Mascart qui se trouve dans une grange en face avec les autres agents de liaison. Je lui donne quelques affaires à nettoyer.

Soudain nous entendons la musique. Je me dirige vers la place ; c’est le 96e qui donne une aubade. Je vois nos officiers ; je salue le capitaine Sénéchal qui est rétabli et loge toujours au presbytère. J’aperçois quantité de jeunes sous-lieutenants, un peu godiche dans leurs uniformes tout neufs. Ce sont les saint-cyriens de la promotion « croix du drapeau », de jeunes Marie-Louise qui n’ont pas encore vu le feu.

Je rentre en visitant notre ancienne salle de spectacle. Ce n’est plus qu’une vulgaire grange ou sont cantonnées des troupes. Adieu aussi, chic concert ! Tout cela sent le départ et tu ne nous reverras plus de longtemps sans doute.

La soirée se passe autour de la table à sabler notre « pénard » avec le vaguemestre en attendant de boire le bon vin du repos. La longue route nous a creusé l’estomac et nous mangeons de bon appétit.

Vers 8 heures, Gallois est appelé au bureau du colonel. Une demi-heure après il rentre un peu ennuyé. Les trois adjudants de bataillon partent avec l’officier de cantonnement* demain matin à 5 heures. Ils doivent se munir d’une bicyclette et filer au-delà de Sainte-Menehould dans des villages dont le nom n’a pas été donné, mais qu’ils connaîtront demain. Ils y feront le cantonnement ; le régiment arrivera vers 2 heures après-midi.

Gallois repart vers le capitaine Sénéchal. Il rentre bientôt me déléguant ses pouvoirs. Me voici bien loti de nouveau. Dans tous ses états le pauvre Gallois se voit perdu. Enfin Caillez lui cède la bicyclette et nous nous chargerons de faire porter son fourniment aux voitures.

Allons un quart* de café ; une note fixant le départ pour demain 9 heures. Et nous communiquons à nos commandants de compagnie heureux du départ car ils sont dans une vulgaire masure. La maison d’habitation est occupée par des officiers du nouveau corps d’armée qui nous succède.

Je rentre et nous nous couchons à même le plancher roulés dans nos couvertures autour du foyer.


[1] ordonnance : Soldat attaché à la personne d’un officier pour l’entretien de ses effets, de ses armes et de son cheval.

17 janvier

Relève* des tranchées.

Au petit jour vers 6 heures je me rends comme la veille près le capitaine Claire pour le compte rendu du matin. Il me manque celui de la 8e. Paradis, le caporal fourrier, ne tarde pas à me l’apporter. Il se plaint que par là on a de la boue jusqu’aux cuisses.

Mascart dans notre abri fait un grand feu pour sécher nos couvertures qui durant la nuit ont reçu de l’eau et qui sont trempées.

Gauthier ne tarde pas à s’amener. Il est toujours le bienvenu. Jombart nous annonce que nous serons relevés ce soir ; il le tient de l’adjudant du ravitaillement Cousinard. Celui-ci a reçu ordre de ne pas amener le ravitaillement ce soir à la Harazée.

Je vais immédiatement donner « le tuyau » au capitaine Claire. Ce doit être vrai, car nous en sommes au septième jour de tranchées. Le capitaine Claire appelle Legueil qui passera probablement sergent fourrier* à la 6e compagnie. Un agent de liaison* lui est adjoint, Verleene.

La liaison se transforme petit à petit. Nous avons Gallois, adjudant de bataillon, Jombart, Sauvage et moi sergents fourriers, Legueil et Paradis caporaux fourriers, Mascart, Verleene, Frappé et Garnier, agents de liaison, les deux cyclistes Caillez et Crespel, René le mitrailleur et Gauthier notre sympathique cuisinier. Legueil ne tardera pas à avoir les baguettes de sergent fourrier et Verleene sans doute celles de caporal.

Les cuisiniers des 5e, 6e et 7e compagnies passent. Je salue l’adjudant Culine qui revient. Il ne peut rester inactif à la Harazée et préfère les tranchées. Je l’admire.

Gallois ne tarde pas à rentrer. Il préfère son poste à celui de chef de section.

Vers midi une note assez longue à copier nous arrive. Le lieutenant-colonel Desplats salue le régiment à la tête duquel il est placé définitivement. La relève aura lieu ce soir. Les commandants de compagnie resteront jusqu’au lendemain matin. Quant aux compagnies elles iront à Florent. Le grand repos a sonné pour nous ; nous irons nous reposer à l’arrière.

Heureux je vais moi-même communiquer la note au capitaine Aubrun tout heureux de n’avoir plus la responsabilité de son coin que durant quelques heures.

Le capitaine Claire vers 5 heures envoie la liaison en second avec Jombart à Florent pour faire le cantonnement. Quant aux fourriers Sauvage, Legueil, Paradis et moi, nous restons jusqu’au lendemain avec les cyclistes et l’agent de liaison de mitrailleuses.

Ainsi dit ainsi fait. Nous nous mettons tous après le départ ensemble dans le plus bel abri, laissons les autres à la disposition de ceux qui viendront nous relever.

À la nuit tombante des officiers arrivent. Ils sont d’un autre corps que le nôtre. Longtemps ils confèrent avec le capitaine Claire puis nous les conduisons au PC de chacun de nos commandants de compagnie. C’est avec un cri de joie que le capitaine Aubrun accueille son successeur. Je descends au PC du bataillon amenant avec moi l’agent de liaison par section. Ce n’est pas facile dans la nuit. Plus d’une fois je fais des chutes et m’aplatis dans l’eau. Mais qu’importe, on est relevé et on va à l’arrière. Quelle chance !

Quand j’arrive, je trouve les agents de liaison du bataillon qui nous relève. Ceux-ci s’installent et m’annoncent que le bataillon n’est pas loin. Il peut être 8 heures du soir.

Une heure après, les éléments de tête arrivent. Je suis appelé par le capitaine Claire qui me donne quelques explications. Je prends avec moi mes agents de liaison des quatre sections qui sont confiées aux quatre chefs de section de la compagnie de relève. Je prends la tête de la colonne et en route !

Vers 10h30 la 5e compagnie passait se dirigeant sur Florent. Quant à moi, ma besogne terminée, je me frottais les mains près du foyer de notre gourbi*, heureux d’avoir fini le premier. Terminé le cauchemar du bois de la Gruerie ! Un repos d’un mois, c’est le rêve ! Jamais je n’aurais espéré cela ! En un mot, que je suis heureux ! Je suis de nouveau rappelé par le capitaine Claire pour conduire une demie compagnie à l’emplacement occupé par le sergent Tercy lors du premier séjour (voir topo tome VI [ci-dessous]) tandis que Sauvage conduit une autre fraction à l’emplacement de la 7e.

TomeVI-planFneMadameAvec bien du mal j’arrive à mon but après m’être cassé le nez sur des éléments du bataillon relevé. Les boyaux de ce côté sont de vrais ruisseaux. Je m’enfonce jusqu’aux genoux. Paradis avait raison de se plaindre.

7 décembre

Relève au bois de la Gruerie

90423614img-2120-jpgNuit excellente et réveil tardif.

Le temps est à la pluie. Cela nous désole car on sent bien que la relève* au bois est proche. Dans la matinée en effet, une note arrive fixant le départ à la tombée de la nuit. On se prépare donc tranquillement, tout en copiant de temps en temps une nouvelle note qu’on communique. Menneval remplace Courquin. Il attend sa nomination de sergent fourrier.

Je passe l’après-midi à composer ma chansonnette sur un air connu et je donne la primeur du premier couplet à mes braves camarades qui applaudissent à tour de bras.

Le voici, intitulé : Le 147e en Argonne

Depuis trois mois qu’on vadrouille en Argonne
Qu’est-ce qu’on y fait ? C’est ce que je vais vous conter
Car notre colon nous permet qu’on déconne
Un petit air que l’on pourra chanter
Quand on va traverser
Toutes les petites cités :

La Harazée    pan pan pan pan
Florent et son clocher         D°
Le pont de la Neuville         D°
Et bientôt Binarville            D°
Vienne-le-Château               D°
Saint-Thomas, son plateau D°
Placardelle, le Claon           D°
Moiremont et plus tard Servon.

Nous partons subitement vers 3 heures, le départ ayant été avancé. Il pleut un peu et cela ajoute à la mélancolie d’une relève. Nous suivons en groupe l’itinéraire connu et fastidieux de Florent à La Harazée, derrière le capitaine Sénéchal à cheval, suivi de Jacques tandis que le bataillon marche dans l’ordre fixé aux compagnies.

Après différentes pauses, le passage au parc d’artillerie, à la cote 211, à la Placardelle, à la cote de La Harazée où nous passons rapidement, nous arrivons dans La Harazée vers 5h30.

Nous entrons dans le jardin qui se trouve devant le château. Quelques obus arrivent dans le village. Nous faisons la pause entre les grands marronniers pendant que le bataillon stationne sur place. Les officiers avec le capitaine commandant rentrent dans le château et en ressortent quelques instants après. Je vois sur le seuil le colonel Rémond qui leur serre la main.harazee

Nous partons, suivons une route qui nous est inconnue, boueuse, plus que boueuse à flanc de coteau. La marche est lente et très pénible. Parfois la boue étant trop dense, nous sommes obligés de monter parmi les arbres auxquels nous nous accrochons et de marcher à flanc de côté. Heureusement que la pluie a cessé et qu’un léger, très léger clair de lune nous permet de voir à peu près où nous marchons.

Enfin nous sommes anéantis bientôt par la fatigue. Il faut suivre quand même.

Plus d’une heure après, suant sang et eau, nous arrivons à un petit carrefour où nous voyons quelques lumières. Une petite rivière barre la route. Il y a un pont de bois fait de quelques modestes planches. C’est tout un art de passer là-dessus par l’obscurité. Plusieurs l’apprennent à leurs dépens et roulent dans l’eau. C’est un bain douche inédit. On s’arrête, croyant être arrivés. On attend, car le capitaine Sénéchal a disparu comme par enchantement. Gallois est affolé.

Une demi-heure après, nous sommes rappelés par une voix connue, celle de notre chef qui nous dit de le suivre. Nous retraversons le pont et nous enfonçons à droite dans une espèce de ravin où nous avons de l’eau jusqu’à mi-jambe. Marche agréable s’il en est ! Jamais je n’ai vu cela et pourtant j’ai vu quelques coins peu enviables !

Le ravin passé, nous sommes sur un boyau adossé contre une colline très haute. On fait une courte pause.

Le capitaine nous rassemble à voix basse et dit qu’on doit monter là-haut en silence sans cigarettes. Il fait nuit noire et sans cela, nous serions vus de l’ennemi. Donc si une fusée monte, s’aplatir et ne pas bouger.

On monte donc. Quelle suée ! Le capitaine, comme nous, est à bout de souffle. On s’arrête tous les 25 m. Parfois on désespère de passer, tellement l’herbe est haute, les boqueteaux nombreux, la terre détrempée. On s’accroche partout, on tombe sur les genoux, il faut parfois ramper, car la crête est presqu’à pic.

Combien de temps ces 100 m d’ascension nous demandent-ils ? Beaucoup. Enfin nous arrivons au haut. Dans quel état ? Heureusement qu’il fait noir et qu’on ne se voit pas. Nous tombons sur un petit boyau qui nous amène bientôt à quelques abris éclairés. Le bois est des plus touffus.

Il commence à tomber quelques gouttes de pluie. Le capitaine nous quitte, disant de nous caser et de lui faire savoir quand chacune de nos compagnies arrivera : il va dans l’abri du chef de bataillon que nous relevons.

Celles-ci ont pris une autre route moins fatigante.

Nous sommes donc arrivés, ce n’est pas trop tôt. Se caser est facile à dire, tous les abris sont remplis de troupes.

Je rentre dans l’un d’eux et reçois l’ordre formel de sortir d’un officier que je reconnais : le lieutenant Ducroo du régiment qui se trouve là avec sa section. C’est donc du régiment qui est là, le premier bataillon, qui va au repos et que nous remplaçons.

Très peu flatté du cordial accueil reçu, je retrouve Carpentier qui me console et qui, flegmatique sous la pluie, mange une saucisse, assis sur un arbre abattu. Je ris malgré moi et fais la même chose que lui. Je crois que tous deux, nous sommes attachés l’un à l’autre pour l’existence.

La saucisse avalée et l’estomac calmé, nous cherchons de nouveau car la pluie continue et sommes assez heureux pour trouver un grand abri occupé par quelques téléphonistes qui nous donnent une place et déclarent qu’ils vont bientôt s’en aller. J’appelle Pignol qui se morfond sous la pluie.

Il peut être minuit quand j’entends la voix du capitaine Aubrun qui, furieux, sa lampe électrique en main, furète partout. Je l’amène à tâtons au capitaine Sénéchal et les laisse se débrouiller tous deux. Je rentre car il pleut toujours et je suis ruisselant d‘eau et de boue de la tête aux pieds. Il y a de quoi attraper une fluxion de poitrine mais je n’ai guère le temps de songer à une pareille bagatelle. Je rencontre Crespel et Caillez qui, au prix de mille difficultés, amènent un paquet de boue : leur bicyclette. Ils ont suivi le bataillon.

Les téléphonistes partent bientôt, nous laissant l’abri qui, heureusement, à certains endroits, empêche l’eau de filtrer. Nous avons alors tout loisir de nous admirer, boueux d’une couche épaisse de boue de la tête aux pieds. Carpentier en a même la figure recouverte car il a fait plusieurs chutes et me fait rire par ses remarques et les grimaces qu’il nous fait.

On ne peut se coucher ; on ne se réveillerait pas. Nous prenons donc le parti à cinq, Pignol, Crespel, Caillez, Carpentier et moi, de continuer le feu laissé par nos prédécesseurs et de passer la nuit à nous sécher. Nos autres amis sont dans des gourbis avoisinants.broquet_halte

Je n’ai pas le courage de m’informer où peut se trouver la compagnie. Je la trouverai toujours demain. Quant aux sacs et aux fusils, attendons le petit jour pour les retrouver.

Le feu nous cause des misères, car le bois est mouillé et nous nous usons les poumons à tour de rôle à souffler dessus.

 

 

 

 

 

 

6 décembre

Aujourd’hui dimanche, Saint-Nicolas, nous nous promettons pour le soir une petite fête agrémentée d’une forte amélioration d’ordinaire.

Dans la matinée, un renfort arrive, composé en grande partie de jeunes soldats de la classe 1914. Le capitaine réunit dans la rue les nouveaux venus et leur adresse un petit speech auquel j’assiste. Je remarque Noël qui est caporal et un vieux brave de 50 ans, engagé volontaire, le caporal Marie que le capitaine félicite et cite à notre admiration de tous.

Je vais avec Carpentier à la grand-messe de 10 heures où l’aumônier divisionnaire qui chante la messe, fait à l’Évangile un magistral discours. 92493890Un mes amis, musicien brancardier, joue quelques morceaux de violon, accompagné à l’harmonica par le chef de musique, Monsieur Legris. Le sous-lieutenant Simon, de sa belle voix, chante également deux partitions.

À la sortie, je vois mon cousin Louis que j’accompagne à la popote où il m’offre un quart* de vin, « le pinard » réglementaire.

À midi, à table, ayant mis chacun la quote-part que j’ai versée, je mange à la popote* de mes amis sous-officiers de la compagnie. Ils ont une grande pièce, deux tables, deux bancs et un foyer. Elle leur sert de salle à manger et de salon de lecture. Je m’y amuse médiocrement et préfère de beaucoup la table de la liaison. D’ailleurs, notre popote est de beaucoup supérieure à la leur : j’ai toujours dit que Gauthier était un cuisinier hors-ligne.

Caillez est parti le matin en bicyclette à Sainte-Menehould pour le compte du capitaine Sénéchal. Il rentre l’après-midi et rapporte quelques bricoles, canifs, glaces, pipes, porte-cigarettes, blagues à tabac. Nous lui achetons tout.

Vers le soir, une note du colonel exprime le désir que des artistes qui se sentent un certain talent composent une chanson sur notre vie dans l’Argonne. Sollicité par mes camarades de l’entourage, je promets de tâcher de composer quelque chose.

Courquin nous quitte aujourd’hui. Il rend ses baguettes pour passer chef de section* et espère passer plus tard à la section des pionniers du régiment. On fêtera ses adieux en même temps que la Saint-Nicolas. Le caporal Menneval doit passer sergent fourrier tandis que Legueil reste caporal fourrier. Huvenois est nommé sergent major à la 6e compagnie.

Le soir, vers 6 heures, nous nous mettons à table, décidés à fêter dignement Saint-Nicolas. Tout se passe bien. À 10 heures, nous sommes encore à table : chacun y a été de sa ou de ses chansons et Pignol et Carpentier font merveille.

Enfin, quand tout est bu et mangé, on se décide à s’étendre pour reposer, car bientôt les tranchées* vont faire entendre leur appel.

La famille se compose actuellement de Gallois, sergent major, qui fait fonction d’adjudant et attend sa nomination, de Carpentier et moi, sergents fourriers* des 8e et 5e compagnies, Legueil et Jombart, caporaux fourriers des 6e et 8e compagnies, Cailliez et Crespel, cyclistes, Gauthier, clairon cuisinier, René, agent de liaison de mitrailleuses, des agents de liaison en second des 5e et 7e, Pignol et Frappé ( ?). Quant à Jacques, maréchal des logis de liaison près le chef de bataillon, il fait partie de notre société au repos. Lors des séjours aux tranchées, il est à la Grange aux bois avec les ordonnances et les chevaux des officiers du bataillon. C’est donc une véritable famille où malgré une note discordante, d’ailleurs peu fréquente, tout le monde s’entend parfaitement.

21 octobre

Nous sommes une vraie famille. De Juniac est l’ancien, le père. Il y a ensuite les quatre fourriers*, Carpentier, Gallois, Huvenois et moi. Gauthier est clairon et cuisinier avec René, l’agent de liaison* de mitrailleuses. Puis viennent les deux cyclistes Crespel et Caillez. Jacques, le maréchal des logis de liaison, fait partie à présent de la suite du colonel.

Dans la matinée, je vais saluer mes amis Verley et Toulouse, secrétaires du trésorier. On parle du pays et cela nous fait plaisir de l’évoquer. Je fais connaissance d’un sergent âgé qui a été affecté avec eux. De retour, je rencontre dans la rue un monsieur de Sedan avec qui j’avais lié connaissance, Bourgerie. Il est arrivé simple soldat réserviste et est affecté comme cycliste et la liaison du colonel.

La journée se passe tranquillement, agrémentée de tartes que nous apporte encore De Juniac qu’on dédommage de ses frais.

À la compagnie, en reçoit des pantalons de velours, ainsi que des souliers. Je reçois une nouvelle paire de brodequins et un pantalon [1]. Cela me comble de joie et la bonne aubaine échoit à chacun d’entre nous à la liaison. C’est une vraie fête.

Mes jambières [1] étaient hors d’usage et les amis étant dans mon cas, nous nous taillons des bandes molletières [2] dans une vieille couverture.

Le soir, nous étions neufs.

Mais bientôt, il peut être 7 heures : alerte. Le commandant nous fait dire que dans 10 minutes, tout le monde doit être rassemblé, prêt à partir. Nous communiquons et revenons nous équiper en hâte, rouler nos couvertures, monter nos sacs, etc…

Puis nous attendons l’ordre de départ.

Nous allons dire qu’on peut former les faisceaux.Gallica-bivouac3 Et deux heures après, tout était terminé. On ne part pas, c’est un simple exercice, dû au général Rabier [3] qui se trouve à Florent, notre général de division. Quelle joie de pouvoir défaire son sac et s’étendre sur la bonne paille !


[1] Consulter le site : http://www.lesfrancaisaverdun-1916.fr/uniforme-habit.htm pour voir les principales composantes de l’uniforme.

[2]  Bandes molletières : Élément de l’équipement des fantassins français, constitué d’une bande en drap de laine enroulée autour du mollet.

[3] Général Rabier : il s’agit de Charles Anselme Adolphe RABIER, dont le fichier LEONORE nous apporte quelques précisions. Vois ci-dessous :
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27 septembre

Couverture du cinquième cahier intitulé Tome IV

Couverture du quatrième cahier intitulé Tome IV

J’ai reçu pour la première fois une lettre depuis un mois. C’est M. René Parenty, lieutenant au 8e territorial, qui m’envoie ses vœux.

Dans la matinée, je m’amuse à réparer les dommages causés par la guerre à mes effets grâce à du fil et des aiguilles prêtés par mon ami Gallois.

entretienUniforme

Deux soldats du 14e régiment du train des équipages militaires entretiennent leur équipement.

Nous commençons à nous habituer au coin et à notre régime. On mange chaud à minuit, froid le jour. On dort peu la nuit, on somnole l’après-midi. On s’abrite vers midi, car il y a menace d’obus. Le grand avantage que j’apprécie est qu’on peut se laver. La température est basse la nuit ; tous les matins nous avons les pieds gelés.

Au petit jour, j’ai communiqué deux fois à bicyclette sur la route grâce au brouillard. Le capitaine Rigault se promenait aux avant-postes, couvert d’une couverture blanche. Le capitaine Aubrun l’a traité de fou. Certainement que s’il continue il se fera tuer.

Vers 11 heures, nous subissons un bombardement terrible et assez précis. Les obus tombent très près de nous. Nos batteries ripostent ; or elles tirent trop court et leurs obus tombent sur nous.

Le cycliste Caillez, au risque d’être tué cent fois, enfourche sa bécane et part vers nos batteries. Il nous semble bientôt qu’elles cessent de tirer. En retour, les boches continuent.

Quelques hommes des compagnies voisines, 5e et 7e, arrivent, affolés, près de nous. Nous avons quelques morts à déplorer. Les obus tombent très près de nous. L’un d’eux tombe sur la route en face de notre abri. Les éclats sont projetés sur les parois.

Il y a accalmie vers 1 heure et demie. Enfin vers 3 heures, on se décide à sortir.

Une note arrive du colonel disant d’envoyer tel et tel soldat à la division pour recevoir une récompense. À la 5e compagnie, il y a Masson, 2e classe. C’est un brave qui, à de maintes reprises, a bien fait et même fait plus que son devoir. Il va recevoir la médaille militaire.

Je vais communiquer au capitaine. Celui-ci ne peut communiquer de jour avec la section Culine sinon il risque de faire tuer l’agent de liaison. Je repars dire cela au commandant. Il faut quand même ; j’ignore d’ailleurs pourquoi.

C’est pourquoi le capitaine envoie Férot un excellent petit soldat. Il l’envoie à la mort, me dit-il. 10 minutes après, Masson s’amène couvert de poussière, pâle, sans képi et sans armes, avec un mot de l’adjudant Culine. Il est arrivé en rampant sous les balles et a rencontré le corps de Férot [1] tué. Des obus ont complètement bouleversé la tranchée : il reste onze hommes. Tranchee-bouleverseePlusieurs ont été enterrés dont l’un d’eux, ami de Masson, qui arrive en bégayant, il a presque perdu la notion des choses et a réussi à passer à travers les balles. Culine déclare garder sa position. Le caporal Backhausen [2] de Sedan, un de mes amis, est tué.

Je pars rendre compte au commandant. Masson a bien gagné de nouveau sa médaille.

À part son artillerie, l’ennemi est calme. Le soir, la compagnie part à ses emplacements de réserve, laissant la 7e compagnie en ligne.

Le commandant lui fait dire de prendre les emplacements en A (voir topo [ci-dessous]).

topoTIII

Plan dessiné par Émile Lobbedey (en couverture du Tome III)

Il faudra chercher. Le capitaine envoie des patrouilles. Enfin vers 9 heures, tout est installé et je puis quitter la 5e pour réintégrer mon logis près du commandant. La liaison s’installe dans l’abri voisin. Il y a un gai luron parmi eux, le soldat Paradis. Le lieutenant Péquin est avec nous.

La 8e compagnie est en réserve en B (voir topo), ayant laissé la 6e en première ligne.


[1] Pérot ou Férot : Pas de certitude quant à la lecture du nom de famille.Ferot

S’agit-il alors de Jules FÉROT ? Dont le lieu de décès pourrait convenir, mais pas la date plus tardive. Voir fiche Mémoire des Hommes.
Le seul Pérot du 147e RI est décédé en janvier 1915.
FicheMDHarchives_E790597R

[2] Backhausen :  Il s’agit sans doute de Marcel François Backhausen, voir ci-dessous la fiche Mémoire des Hommes qui, en dehors de la date de décès (29 sept. au lieu de 27), semble correspondre.

FicheMDH-archives_B420109R